Page:Reclus - John Brown, 1867.djvu/5

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dans les terres encore incultes de l'Ouest, et de grossir ainsi la population libre. C'était une guerre à mort entre les deux sociétés qui se heurtaient sur les bords du Kansas. D'un côté, arrivaient les Missouriens, traînant après eux leurs chiourmes d'esclaves ; de l'autre, venaient les travailleurs yankees, défrichant eux-mêmes le sol, ouvrant des écoles dans les clairières à peine ouvertes, établissant des imprimeries sous les grands arbres de la forêt. Les planteurs décrètent une constitution d'État, faisant de l'esclavage la « pierre angulaire » de leur société ; les abolitionnistes en votent une autre, affirmant que la servitude est « la somme de toutes les infamies ». Les esclavagistes brûlent les cabanes des pionniers ; ceux-ci font des incursions dans le Missouri pour libérer les noirs ; les bandes armées se rencontrent sur la frontière ; pendant de longues années, le sang ne cesse de couler. Dans cette lutte implacable, entre l'esclavage et la liberté, nul chef de partisans ne fut plus audacieux, plus fécond en ressources, plus infatigable que le « capitaine » John Brown. Dans ces combats incessants, il perdit un de ses nobles fils, un autre devint fou ; mais, à la fin, il eut la joie de voir que les abolitionnistes l'emporteraient. En dépit de la connivence du président des États-Unis avec les planteurs, en dépit de la trahison du gouverneur et de toute l'administration locale, la population libre du Kansas ne cessait de s'accroître, les esclavagistes ne se hasardaient plus à passer la frontière ; l'institution