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Page:Reclus - La Commune de Paris au jour le jour.djvu/178

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journal de la commune

et de l’industrie qui proclament aussi le dogme de la décentralisation à outrance. Chacun d’eux est maître et seigneur dans quelque Commune dont l’indépendance absolue du pouvoir central serait la tyrannie absolue de quelque usurier ou gentillâtre. C’est un fait malheureusement incontestable. Si chaque Commune française avait le droit de diriger ses écoles à sa guise, il serait opéré une razzia d’instituteurs laïques à remplacer par des ignorantins et ignorantines. Si chaque Commune avait le droit de fixer elle-même ses impôts, la majorité commencerait par retrancher les subventions aux routes, à l’enseignement, à tout service d’utilité publique — et la belle chose que cela serait si chaque ville ou village de notre connaissance organisait souverainement sa justice ! — Ah braves gens de la Commune quand on tient une bonne idée, il faudrait prendre garde de ne pas l’exagérer jusqu’à l’absurde !

Le Manifeste dont la Commune a endossé la responsabilité si maladroitement, n’est qu’une improvisation individuelle, l’expression peu réfléchie d’un groupe, une œuvre d’honnête sectaire. C’est un Utopiste qui a parlé, ce n’est pas un Gouvernement. Or ce que la France attend avec impatience de toutes les Révolutions qui se succèdent, c’est qu’il en apparaisse une enfin qui se montre capable d’être un Gouvernement. La France ne lui demande pas d’être infiniment meilleur, incomparablement plus intelligent que les pouvoirs qui ont précédé : un peu plus de liberté, un peu plus d’honnêteté et de la bonne administration ; mais de l’administration, impossible de s’en passer dans une machine sociale aussi compliquée que la nôtre.

Je n’ai vu personne que le Manifeste ait enthousiasmé ; mais j’ai vu des gens découragés et quelques-uns irrités. Les journaux, qui naguère sommaient la Commune de donner un programme quelconque, se font une joie de le déchirer en lambeaux. Ce sont les mêmes qui, après avoir impérieusement réclamé des réélections à la Commune, ont défendu à leurs partisans d’y aller voter. Dans l’affaire des réélections, la Commune a manqué de tact et de jurisprudence ; dans son programme qui ne peut pas être un programme, notre Dictature montre qu’elle n’est pas un Gouvernement.

Au lieu de ce factum verbeux, que la Commune n’a-