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DIDEROT.


emploient et sur les ouvrages qu’ils fabriquent », il entreprendra la théorie des professions dont ils ne savent que la pratique. Il caresse d’une même sympathie les métiers les plus humbles et les métiers les plus compliqués. Il s’attache à la glorification de cette machine où des esclaves ignorants ont vu l’œuvre du démon et que d’autres barbares, plus tard, non moins stupides, mais plus ingrats, dénonceront à leur tour. Il devine en elle l’instrument du progrès ; alors même qu’il ne la comprend pas, son instinct l’avise qu’une force bienfaisante doit être en elle ; « il ose donner aux savants l’avis de ne pas juger des choses avec trop de précipitation, de ne pas proscrire une invention comme inutile, parce qu’elle n’aura pas dans son origine tous les avantages qu’on pourrait en tirer ». L’esprit moderne, dans ce qu’il a de plus hardi, est en ces quelques pages et dans l’article Art qui en est le développement. Il trace « le projet d’un traité général des arts mécaniques » et, rêvant d’une méthode de découverte, esquisse la science expérimentale. « Nous devons au hasard un grand nombre de connaissances ; il nous en a présenté de fort nombreuses que nous ne cherchions pas : est-il à présumer que nous ne trouverons rien quand nous ajouterons nos efforts à son caprice et que nous mettrons de l’ordre et de la méthode dans nos recherches ? » Aucun progrès industriel, mécanique, scientifique ne lui paraît impossible. « Pour nous encourager dans nos recherches, ne suffit-il pas