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SIGURD.

marche sur la neige et la glace des montagnes, le soir quand Sigurd et Gudruna se retirent ensemble.

« On m’a privée d’époux et de joie, je trouverai ma joie dans des pensers cruels. »

Dans un de ses accès de jalousie, elle excite Gunar à faire périr Sigurd. « Tu me perdras, Gunar, tu perdras entièrement ma terre et moi-même ; jamais je ne partagerai une joie avec toi ; je m’en retournerai où j’étais auparavant, auprès de mes proches et de mes amis, là je demeurerai et je mènerai une vie tranquille, si tu ne fais périr Sigurd, et si tu ne deviens un roi au-dessus des autres rois. »

« Ayons soin que le fils suive le même chemin que le père. Il ne faut pas élever ce jeune loup ; car à qui la vengeance ou la composition du sang a-t-elle été plus facile, parce que le fils de son ennemi vivait ? »

Gunar hésite à lui obéir, à se priver d’un tel appui, à manquer ainsi à la foi jurée, il hésite ainsi durant une heure. Enfin, il va trouver son frère Hogni, et lui dit :

« La seule Brunhilde vaut mieux pour moi que toutes les femmes ; je perdrai plutôt la vie que de consentir à perdre les richesses de mon épouse.

« Veux-tu que nous nous emparions du trésor de ce chef ? Il est bon de posséder l’or des fleuves[1], de jouir de ses richesses et de goûter en paix le bonheur. »

Enfin, ils se décident pour le meurtre, et en chargent Guttorm[2], leur plus jeune frère qui n’avait rien juré. Sigurd est traîtreusement percé pendant son sommeil. « Le glaive pénétra jusqu’au cœur de Sigurd. Le vaillant tenta la vengeance, il chercha à porter un coup au meurtrier qui s’enfuyait. Le fer étincelant atteignit Guttorm, lancé fortement par la main du roi. »

Son ennemi tomba en deux parts ; les mains et la tête tombèrent

  1. Ce nom poétique de l’or fait allusion à celui que roulaient les fleuves, et qui joue un si grand rôle dans toute cette histoire.
  2. Prononcez Goutorm.