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REVUE DES DEUX MONDES.

Lors d’une revue à Bagshot, un audacieux voleur ayant réussi dans la foule à dérober à ce prince de la police son chapeau, le roi George iii s’était infiniment amusé de cette aventure. — « Eh ! eh ! eh ! Townsend ! avait dit en riant le roi, vous avez perdu votre chapeau. Ne voilà-t-il pas un beau gardien que l’on me donne ? Un homme qui ne peut défendre son chapeau sur sa propre tête ! Vraiment si vous n’y veillez mieux, mon garçon, vous me laisserez voler ma couronne. »

Townsend était un vrai disciple de la vieille école politique ; en parlant de George iv, il disait souvent : « — Dieu veuille avoir son âme ! C’était là un roi. Il y avait à peine deux ou trois personnes qui pussent arriver jusqu’à lui ; mais ce nouveau prince (Guillaume iv), ce n’est vraiment que la moitié d’un roi, il se donne à trop bon compte, et tout le monde peut l’approcher. »

Townsend avait un grand respect pour l’aristocratie, et cela le choquait singulièrement de voir les enrichis et les parvenus rivaliser avec la vieille noblesse en magnificence. À cette occasion, en parlant de l’opéra de Londres actuel, il disait un jour à quelqu’un : « Ah ! monsieur, j’allais à l’opéra il y a cinquante ans, et c’était bien alors que ce théâtre méritait d’être appelé celui du roi ; car il n’y avait que la noblesse qui pût y avoir des loges. Mais à présent vous y voyez une duchesse et tout vis-à-vis d’elle quelque marchande de fromage en gros. »

Au dernier couronnement, comme il se tenait son bâton à la main, regardant avec admiration le banc des pairesses et s’extasiant sur la beauté de quelques-unes d’entre elles qu’il avait vues, disait-il, dans les bras de leurs nourrices, il fut particulièrement frappé des attraits d’une dame qu’il ne reconnut pas d’abord. Comment cela pouvait-il cependant se faire ? Cette femme était belle et de plus comtesse, et il ne savait pas son nom ! Il apprit enfin qu’elle avait résidé long-temps à l’étranger, ce qui excusait fort, assurément, dans ce cas, l’ignorance de Townsend.

Une autre mort, mais une mort violente, une effroyable exécution dont les journaux ont à peine parlé, est pourtant certes bien digne d’être enregistrée dans notre chronique et de figurer au nombre des faits qu’elle amasse pour les historiens à