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LE TEXAS ET SA RÉVOLUTION.

huila, le général Stephen Austin fut chargé de négocier ce changement avec le gouvernement de Mexico, et accepta cette mission par déférence pour le vœu de ses concitoyens, car il était un de ceux qui avaient combattu le projet de scission. Arrivé à Mexico dans le cours de l’année 1833, Austin y travailla inutilement, auprès de Santa-Anna et du vice-président Gomez Farias, à faire reconnaître la prétendue constitution du Texas. Il représenta en termes très vifs et presque menaçans que, si l’on ne voulait pas s’occuper des affaires de cette province et remédier aux abus dont elle se plaignait, la population se chargerait elle-même de ce soin. Le gouvernement de Mexico ne fit aucune attention à ses demandes. Retiré à sa ferme de Manga de Clavo, Santa-Anna contrariait toutes les mesures de Gomez Farias, qui était resté sincèrement attaché au parti démocratique, tandis que le parti contraire, flattant l’orgueil de Santa-Anna, concevait l’espérance d’attirer à lui cet esprit mobile et faible. Il ne résultait d’une pareille situation que lenteur et embarras dans la marche des affaires, et rien ne ressemblait moins que cette complication de basses intrigues à un gouvernement régulier. Ce fut alors que le commissaire texien adressa à la municipalité de San-Antonio de Bejar une lettre dans laquelle il annonçait le peu de succès de ses démarches, et conseillait à la population d’organiser pacifiquement dans la province une administration locale. La majorité de l’ayuntamiento de Bejar, ancienne ville espagnole, était opposée aux vues des colons anglo-américains, et la lettre d’Austin fut renvoyée aux autorités de la république. Celui-ci avait déjà quitté Mexico et n’était pas loin du Texas quand il se vit arrêté, reconduit dans la capitale, et jeté en prison comme séditieux. Le plus singulier de l’histoire, c’est qu’au fond il ne partageait que très faiblement l’opinion et surtout l’impatience de ses concitoyens. On serait porté à croire qu’il ne leur donnait ce conseil que pour leur faire plaisir, et parce qu’il désespérait de les ramener à une opinion différente. Dans une lettre à l’ayuntamiento de San-Felipe, datée de Monterey le 17 janvier 1834, il engage les colons à se tenir tranquilles, à respecter les lois, à procéder par les voies légales ; il trouve tout simple que le gouvernement l’ait fait arrêter ; il se porte garant de ses bonnes intentions à l’égard du Texas, et en fait valoir comme une preuve convaincante l’abrogation de la loi du 6 avril 1830[1]. En acceptant la mission qu’il vient d’accom-

  1. Je ne sais comment concilier cette assertion de Stephen Austin avec le passage suivant du livre de M. Chester-Newell, historien de la révolution du Texas : « Les effets de la loi du 6 avril 1830 ont été suspendus ; mais la loi elle-même n’a jamais été abrogée. »