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Page:Revue des Deux Mondes - 1844 - tome 6.djvu/358

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REVUE DES DEUX MONDES.

est bien lourd : — jambes finement étudiées et modelées. Réparons ici à l’égard de cet artiste une omission inexcusable, en mentionnant ses deux figures en marbre de la Bienfaisance et des Arts, dont la première surtout offre des draperies d’un grand style et une belle tournure. Après Portalis vient un autre grand dignitaire de l’empire, qui heureusement, ainsi que le savant et profond législateur, avait d’autres droits au marbre ou au bronze que ses honneurs et ses titres, le marquis de Laplace. Cette figure assise, de M. Garraud, est une de celles qui ont certainement coûté le moins à l’artiste, car sauf la tête, où paraissent quelques traces d’étude et de travail, le reste est tout de fabrique. Il n’en est pas de même du dauphin Louis de France, fils de Louis XV, par M. Dantan aîné, morceau de sculpture coquette, curieusement façonnée et poudrée. Les habits du temps prêtaient au marivaudage. M. Dantan en a fait, mais avec discrétion cependant et esprit. C’est une jolie statuette de cinq à six pieds. L’esprit et la distinction ne sont pas, en revanche, les qualités qui frappent le plus dans le Bossuet de M. Feuchères, figure sans caractère, chargée plutôt que vêtue d’une draperie de caprice, à petits plis carrés, brisant la lumière comme un miroir à facettes.

Passons sans y regarder deux fois devant le portrait du duc d’Orléans, et rappelons seulement que M. Jaley est l’auteur d’une des meilleures statues qui aient été faites de notre temps, le Mirabeau du vestibule de la chambre des députés. — L’Étienne Pasquier, de M. Foyatier, est bien posé, bien assis, mais d’un goût terriblement banal dans l’ensemble et dans les détails. Je ne sais si ce bon Pasquier ressemblait à la tête que lui donne l’artiste, et dans ce cas je le plaindrais, car elle est passablement ingrate et hétéroclite. Si l’on essayait de caractériser en peu de mots le Bessières, de M. Molchnet, on pourrait dire de cette sculpture qu’elle est froide, sèche, raide, dure et maigre ; ce qui surprend d’autant plus que cet artiste passe pour être un de ceux qui caressent, comme on dit, le plus volontiers le marbre. Il faut donc croire qu’il ne s’est pas souvent approché de celui-ci. — Quant au Colbert, de M. Debay, le dernier dont nous nous souvenions, c’est une masse de pierre carrée, solide, bien équilibrée, en présence de laquelle la première idée qui vous vient est de demander : Combien cela peut-il peser ? L’habileté bien connue de l’artiste permet de supposer que ce marbre a quelque autre mérite que celui du poids, et nous nous associons d’avance à tous les éloges qu’on pourra donner à cette estimable figure que nous avons eu l’inexcusable négligence de ne pas assez regarder.