Page:Revue des Deux Mondes - 1861 - tome 32.djvu/152

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dont les végétaux nous ont fourni un exemple si frappant. On a vu des chiennes courtisées successivement par des mâles de diverses races mettre bas des petits qui accusaient le mélange de trois souches différentes. Tout s’était passé chez elles comme dans les courges de M. Naudin.

Il est presque inutile d’ajouter maintenant que le métissage artificiel ne présente aucune difficulté, et que les unions croisées de cette espèce, accomplies sous le contrôle de la volonté de l’homme, sont aussi sûrement fécondes que celles qu’il peut former entre individus de même race. Aussi nous bornerons-nous à rappeler qu’elles sont depuis longtemps entrées dans la pratique journalière et qu’elles constituent un des procédés le plus fréquemment employés pour améliorer, modifier, diversifier les végétaux aussi bien que les animaux sur lesquels s’exerce l’industrie humaine. Nous n’ajouterons qu’une seule remarque, dont l’importance ressortira de la comparaison avec d’autres faits. Nous avons dit dans une autre étude comment, à force de perfectionner une race animale ou végétale, on arrivait souvent à diminuer d’une manière sensible, parfois à éteindre complètement chez elle les facultés de reproduction. Dans ce cas, le croisement avec une race moins modifiée ravive en quelque sorte ces facultés. Par exemple, des porcs de race anglaise, importés en France, où ils avaient cessé de se reproduire après quelques générations, redevinrent féconds dès qu’on les croisa avec la race locale, plus maigre et moins précoce, mais plus robuste et moins éloignée du type primitif[1]. La vigueur de l’une vint évidemment en aide à la faiblesse de l’autre. Ici encore le règne végétal présente des faits tout semblables.

En résumé, le métissage, c’est-à-dire le croisement entre individus de races différentes, est toujours facile, et les résultats en sont aussi certains que ceux de l’union des individus appartenant à la même race. Rien plus, dans certains cas, la fécondité s’accroît ou reparaît sous l’influence de ce croisement. — L’hybridation, c’est-à-dire le croisement entre individus d’espèces différentes, va nous montrer des faits diamétralement opposés. Voyons d’abord ce qu’elle est chez les végétaux qui se reproduisent sans l’intervention de l’homme.

Dans les champs comme dans nos jardins, les conditions générales de l’hybridation ne diffèrent pas de celles du métissage. Dans les champs mêmes, les chances de croisement semblent être bien plus multipliées entre espèces qu’entre races, car le nombre des premières qui fleurissent en même temps est infiniment supérieur à

  1. Ce fait m’a été communiqué par M. le marquis de Ginestous, président du comice agricole du Vigan.