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Page:Revue des Deux Mondes - 1872 - tome 99.djvu/16

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Français et quatre étrangers. Ce conseil délibère, sous la présidence du consul, sur le budget des recettes et des dépenses, sur les tarifs de perception, sur les mesures et travaux de voirie, la seule action des contribuables est d’en élire les membres et d’approuver leur gestion. Le consul dresse la liste électorale et convoque les électeurs ; il a le droit de suspendre et de dissoudre le conseil, qui du reste ne se réunit que sur son invitation. Il peut également empêcher l’exécution des délibérations par un arrêté motivé, et sous réserve de l’assentiment du ministre de France. Le conseil doit soumettre à son approbation les nominations qu’il fait aux emplois rentrant dans le service municipal. Le maintien de l’ordre et de la sécurité publique sur la concession, de même que la direction du corps de police, dont l’entretien est à la charge du budget municipal, restent exclusivement dans les attributions du consul ; il nomme les agens de police, les suspend ou les révoque. Aucun étranger ne peut être arrêté dans les limites de la concession française, même en vertu d’un mandat émanant d’un juge ou d’un tribunal de sa nation, sans l’autorisation du consul et sans le concours de ses agens. Sur les concessions neutres au contraire, chaque consul fait arrêter ses nationaux où et quand il le veut. On le voit, la France a réglementé ici comme sur son propre territoire ; son représentant est un préfet impérial dans tout l’éclat de son autorité. Il est maître absolu d’une police à l’entretien de laquelle la France n’a point de part, et que même, avec assez de sans-gêne, on déclare tout particulièrement être à la charge d’un budget municipal qu’alimentent pour la plupart les contributions de résidens non français et de sujets chinois.

Il est facile d’apercevoir les embarras que peut créer à la France cet isolement, ce rôle égoïste, si peu conforme à son caractère généreux. Il lui impose le devoir de défendre seule ce coin de terre qui ne lui rapporte rien, où elle n’a pu développer jusqu’ici son commerce et son industrie. Sur les concessions anglo-américaines, aucune nationalité n’a plus de responsabilité morale qu’une autre pour la défense des résidens ; si l’Angleterre est tenue, le cas échéant, par le développement supérieur de ses intérêts et le nombre plus considérable de ses nationaux et de ses navires, de prendre matériellement à sa charge la majeure part des moyens d’action, elle s’est acquis, en rendant sa concession neutre, le droit moral de pouvoir faire appel au concours des autres. Nous au contraire, devant un danger qui menacerait notre concession, à qui pourrions-nous recourir ?

La concession française, outre 60,000 Chinois, compte environ 460 étrangers, sur lesquels 232 Français, dont une vingtaine au