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Dans une lettre que, presque au même moment, le Roi adressait à Madame Royale pour lui bien faire connaître sa famille française, de laquelle elle était depuis si longtemps séparée, on retrouve les préoccupations dont s’inspiraient les conseils adressés par lui à l’héritier présomptif de la couronne.

«… Je vous ai déjà dépeint le caractère de mon neveu. J’espère que vous avez été contente du portrait, et je suis certain que vous le trouverez ressemblant ; il vous sera d’autant plus facile d’être heureuse avec lui, que son cœur, gardé par sa vertu, ne s’est jamais donné qu’à vous, et que ses principes, aidés par ce que vous valez, vous garantissent que ce premier sentiment sera aussi le dernier. Mais je vous connais mal, ou non contente d’être heureuse dans votre intérieur, vous voudrez aussi que votre mari réponde à ce que les circonstances demandent de lui, et, pour ma part, je vous avouerai que je garde bien plus mes espérances à cet égard sur vous, que sur tout ce que j’ai pu faire moi-même. La différence d’âge, l’habitude de respecter et même de craindre un peu, font toujours voir à un jeune homme un peu de pédanterie dans les leçons de ses parens, au lieu que dans la bouche d’une femme aimable et chérie, autant qu’estimée, la raison devient sentiment, et son empire, pour être plus doux, n’en acquiert que plus de force.

« Né avec une grande facilité pour le travail, mon neveu a forcément mené pendant longtemps une vie qui lui a fait perdre l’habitude et même le goût de l’application. Je me suis efforcé de détruire ce défaut, le seul véritable que je connaisse en lui ; j’y ai réussi en partie, c’est à vous d’achever l’ouvrage, et lorsqu’il saura par vous-même que le meilleur moyen de vous plaire, est de se rendre en tout digne de vous, les mauvaises habitudes disparaîtront bientôt ; vous en serez plus heureuse, vous ferez la joie de toute notre famille, et la France vous devra un jour son bonheur. Ce que j’attends là de vous ne vous donnera aucune peine. Tendrement aimée, vous n’aurez qu’à le vouloir pour posséder la confiance d’un mari timide, mais dont l’âme ouverte et loyale ne demande qu’à s’épancher dans la vôtre. »

Après ces réflexions sur le Duc d’Angoulême, le Roi passait en revue les autres membres de la famille des Bourbons de France.

« Ce serait vouloir vous donner des leçons, et, comme