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Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 46.djvu/488

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peines seulement, quiconque, à l’aide de violences, voies de fait, menaces » manœuvres frauduleuses, aura amené ou maintenu, tenté d’amener ou de maintenir une cessation concertée du travail, dans le but de forcer la hausse ou la baisse des salaires ou de porter atteinte au libre exercice de l’industrie et du travail.

ART. 415 (nouveau). — Lorsque les faits punis par l’article précédent auront été commis par suite d’un plan concerté, les coupables pourront être mis, par l’arrêt ou le jugement, en état d’interdiction de séjour pendant deux ans au moins et cinq ans au plus.


Les modifications ainsi apportées au Code pénal étaient décisives : les coalitions et grèves devenaient licites aux ouvriers et aux patrons ; seuls les actes de violence et les manœuvres frauduleuses étaient punis ; les peines, contrairement au code primitif, étaient les mêmes pour les patrons et pour les ouvriers. Tel est le droit qui nous régit encore aujourd’hui ; les groupes avancés des Chambres demandent la suppression de ces articles qui peuvent, cependant, être considérés comme irréprochables ; la seule critique qu’on puisse leur adresser, c’est que les peines extrêmes qui y sont stipulées, à savoir trois ans d’emprisonnement et cinq ans d’interdiction de séjour, sont bien élevées ; mais l’on se tient toujours fort en deçà, et les tribunaux ne font plus de ces articles qu’une application intermittente et pusillanime. Le second Empire se flattait que, en faisant régner l’ordre dans la rue, en sauvegardant énergiquement les ateliers et la liberté des non-grévistes, il pouvait autoriser les grèves sans inconvénient grave pour l’industrie et pour le public. Bientôt, par d’autres mesures, le gouvernement impérial mettait absolument sur le même pied juridique les patrons et les ouvriers, les employeurs et les employés. Une circulaire de 1868, insérée au Moniteur, enjoignait aux préfets et aux parquets d’accorder aux Chambres syndicales ouvrières (c’est le titre qu’avaient pris les groupemens ouvriers) une tolérance égale à celle dont jouissaient les Chambres syndicales des patrons. Ainsi s’ébauchait, sous un gouvernement démocratique, mais autoritaire et énergique ou réputé tel, l’émancipation ouvrière qui avait été comprimée pendant plus d’un demi-siècle. Ces groupemens, placés sous l’œil et la main de l’autorité, commençaient à chercher à lui échapper et tendaient à se fédérer. « En 1870, dit l’auteur d’un livre récent sur le Syndicalisme et sur la Confédération générale du travail, M. Mermeix, soixante-sept Chambres syndicales (ouvrières) avaient une existence connue de l’autorité et la plupart d’entre