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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 51.djvu/476

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nouveau tend à se fonder non plus sur l’équilibre des forces, mais sur l’égalité des vertus ou des qualités, des mérites et de la culture entre les nations. Il leur suppose un commun niveau, une commune mesure, de communes intentions, un commun objet, ce n’est pas assez dire : un idéal commun. Fasse le ciel que ce ne soit pas rêverie et chimère, et que des survivances mauvaises, des vices héréditaires, de vieilles habitudes, d’incorrigibles penchants et des passions incoercibles n’étouffent pas ce germe de morale introduit dans les relations internationales ! Mais venons-en aux stipulations positives.

Elles sont rangées, ou nous les rangerons, sous deux titres principaux : Clauses territoriales ou Restitutions; Réparations et garanties. C’est d’elles, avant toutes autres, que les esprits sont le plus préoccupés, et ils le sont d’autant plus vivement qu’on a plus durement subi le contact de cet ennemi du genre humain que n’a cessé d’être l’Allemand à travers les siècles. Sorti des forêts de la Germanie, sorti des universités de Prusse, il a toujours été le même, incommode, hargneux, avide, rapace, querelleur et dangereux voisin : celui que la sécurité oblige à maintenir chez lui et contre lequel la prudence commande de s’enfermer chez soi. Vis-à-vis de l’Allemagne, tout traité vaudra en premier lieu ce que vaudront les précautions prises à cet effet ; et ces précautions elles-mêmes vaudront en premier lieu ce que vaudront les murs et les portes, ce que valent les barrières, les frontières. C’est donc par une sage distribution des matières qu’aussitôt après avoir ébauché le pacte de la Société des Nations, le traité, en sa partie deuxième, trace les frontières de l’Allemagne. Il les trace de tous les côtés, avec la Belgique, avec le Luxembourg, avec la France, avec la Suisse, avec l’Autriche, avec la Tchéco-Slovaquie, avec la Pologne, avec le Danemark.

Pour en avoir une vue claire, il convient de grouper en un seul chapitre tout ce qui concerne les frontières de l’Allemagne à l’Ouest-Cette frontière, avec la France, est « la frontière de juillet 1870, depuis le Luxembourg jusqu’à la Suisse ; » et si la forme de ce paragraphe, au moins dans le résumé, est déplaisante, le fond, quand il se découvre, en est dur. La frontière de juillet 1870, qu’est-ce à dire? C’est-à-dire la frontière de 1815; c’est-à-dire qu’on ne nous rend que la moitié du bien qui nous fut volé; c’est-à-dire que nous ne rentrons pas même dans nos limites de 1814; qu’on laisse béantes à notre flanc des ouvertures artificieusement ménagées, et, sur ces confins où rôdent les pillards, notre maison mal close. Nous n’avons pas Landau, nous n’avons pas la ligne de la Queich; nous ne tenons pas, chose