Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 51.djvu/691

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

(Etat fédératif). La première conception ne répondait guère qu’à une alliance permanente, conclue contre les agressions du dehors et les discordes intérieures, entre des États qui gardaient la plénitude de leur souveraineté, et dont l’organe commun était réduit à un titre honorifique et à une influence morale. D’après la seconde, réalisée par la Prusse après 1866, ils abdiquaient une partie de leurs droits entre les mains d’un pouvoir central, supérieur et distinct, possédant des institutions et des ressources propres, disposant d’une force légale pour trancher leurs différends et d’une force armée pour leur imposer ses décisions.

De ces deux solutions, la première était celle des patriotes allemands, et le plus autorisé d’entre eux, le baron de Stein, comptait la réaliser en restituant à l’Autriche l’ancienne dignité impériale, accompagnée d’attributions plus étendues que par le passé. Insensible à l’éclat d’un titre dont il était déjà revêtu dans ses domaines héréditaires, l’empereur François en redoutait surtout les obligations et les responsabilités. Il déclina donc l’offre qu’il avait reçue, mais avec la ferme intention d’empêcher qu’elle pût profiter à d’autres. Par un appel habile aux sentiments particularistes des petits États allemands, il réussit donc à faire échouer les diverses combinaisons successivement proposées pour partager le pouvoir suprême, soit avec la Prusse par la formation de deux Confédérations du Nord et du Sud, soit avec les royaumes secondaires par la division de l’Allemagne en cinq cercles, ayant chacun à sa tête un État dominant. — Le résultat de ces manœuvres apparut dans l’Acte constitutif de la Confédération germanique (8 juin) : le texte en portait qu’un lien permanent unirait à l’avenir les princes « souverains » de l’Allemagne. L’adjonction de cette simple épithète avait une portée que précisaient deux articles subséquents. L’un (3) assurait une complète égalité de droits à tous les membres de la Confédération ; l’autre (7) exigeait l’unanimité des suffrages pour le règlement des questions les plus importantes qu’ils pussent avoir à résoudre.

Ces restrictions rendaient impossible en fait l’exercice de l’autorité fédérale. Les conséquences devaient s’en dérouler au cours du siècle, aussi favorables à la France que désastreuses pour l’Allemagne : c’étaient, pour l’une, la sécurité de ses frontières assurée jusqu’à la réalisation de l’unité germanique ;