Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/225

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’est pas venu au monde pour consoler ni pour attendrir, » et enfin le trouve extrêmement « pauvre d’élévation et de je ne sais quoi qu’on s’est accoutumé à nommer poésie. » Sa grande amitié fut Mme de Sévigné, dont il avait toujours un volume de lettres sous la main : « Heureux livre ! qui ne se compose que de pages charmantes et pures, semblable à une campagne pleine partout d’épais gazons, de grands arbres et d’eaux vives, où l’on s’aventure sans aucune appréhension de rencontrer ni reptiles, ni mares infectes, ni chiens enragés, pas même un seul visage désagréable, puisque cette marquise est toujours là, vive, fine, joyeuse ou attendrie, pour donner un tour plaisant aux importuns et les congédier avant qu’ils ennuient. » Sans doute, elle a « des mots désobligeants, » elle a de « petites erreurs de jugement, » regrettables quelquefois ; mais voyez l’indulgence de Veuillot : « Qu’est-ce que nous pardonnerons, si nous ne pardonnons cela ? » Il le pardonne à elle et ne le pardonne pas à d’autres. Elle se trompe de temps en temps ? Alors, il s’amuse à penser qu’il aurait pu lui tenir tête, lui prouver qu’elle n’aimait pas tant M. Nicole et qu’elle avait beaucoup plus d’esprit que « le bon Coulanges. » Il dit le bon Coulanges et le dit par complaisance pour son amie ; mais il n’a pas lu les chansons de Coulanges, probablement : s’il les avait lues, il devrait se fâcher. Et qu’importe ? Rien ne lui gâte son amie : w Ce charme, cette grâce et ce cœur simple, comment ne pas les chérir ? Comment ne pas aimer cet air de raison, de politesse et de bonté ? « Ces lignes encore sont jolies : « La grâce et la fleur de l’intelligence, plus délicieuses qu’ailleurs chez Mme de Sévigné, à cause de son perpétuel épanouissement d’honnête joie... » Les mois sont ici pour dire exactement ce qu’on veut dire, et pour noter un fait, et aussi pour rendre, par le son, l’image et enfin la poésie, une impression plus vraie et persuasive qu’aie idée. Jamais critique n’a été plus sensible que ne l’est Veuillot quand il aime.

Quand il n’aime pas... Le voici, fonçant sur la chiennaille.

Il prend la race de Caïn dès le XVIe siècle où elle prélude à ses forfaits. Il considère comme les « fondateurs du langage » Rabelais, Bonaventure Desperriers, Clément Marot et leurs disciples, « beaux diseurs de philosophie et d’érudition, railleurs, chansonniers, plaisants sournois et implacables ; » il loue leurs « pages nettes, vives et élégantes : » il les déteste, » si habiles à réveiller les instincts mauvais du cœur, à les pousser à la révolte contre l’ennemie de toutes les concupiscences, » l’Église. Il écrit : « La littérature proprement dite, en France, n’est pas de bon lieu. Elle est (ille du protestantisme, elle