Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/310

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


VI. — ROME ET LES INTERNATIONALISMES NOUVEAUX.

Ainsi Rome, sans impatience, mais sans lenteur, épie-t-elle soucieusement, activement, les répercussions religieuses des révolutions humaines. Il semble que, pour l’heure, ces révolutions ne lui ouvrent aucun autre champ d’activité : elle est tenue à l’écart, dans les reconstructions actuelles du monde. Alors qu’au moyen âge elle fut la mère du droit des gens, la jeune Société des Nations paraît se disposer à l’ignorer. Dans ces divers États qui vont s’associer, le Saint-Siège compte des millions de fidèles : son autorité morale, librement acceptée par eux, pourrait un jour déterminer ces millions de consciences à devenir, dans leurs différentes patries, des auxiliaires de bonne volonté pour les décisions ou pour les vœux que balbutierait la Société des Nations. Les conseils internationaux où tenterait de s’élaborer un peu de justice trouveraient dans la collaboration du Saint-Siège un élément de prestige dont ils pourraient attendre une efficacité.

Un juriste illustre qui, dans l’aréopage de La Haye, posa déjà quelques-unes des assises du monde nouveau, le regretté Louis Renault, cherchait à corriger les mesures d’ostracisme qui exilaient des deux premières conférences la souveraineté de Léon XIII et celle de Pie X.

L’espoir même qu’il fondait, pour la paix, du monde, sur la pratique de l’arbitrage international et sur la reconnaissance de certaines sanctions, l’amenait à souhaiter, pour cet arbitrage, un surcroit d’éclat, et pour ces sanctions un surcroît de vertu. On avait là, tout proche, l’ascendant de la Papauté ; pourquoi ne le point utiliser ? Et Louis Renault constatait qu’elle était évincée… Evincée sans appel, et sans possibilité de résipiscence, si l’on eût accepté, en 1899, la formule d’après laquelle les quarante-six signataires de la convention de La Haye se réservaient le droit de fixer les conditions auxquelles les autres « États » pourraient ultérieurement adhérer à cette grande œuvre internationale. La Papauté n’était plus un « État : » de par ce texte, elle n’était même pas comprise parmi les souverainetés dont les contractants de La Haye pouvaient éventuellement accepter l’adhésion. Louis Renault demanda qu’au mot États le mot puissances fût substitué. Le