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Moyeuvre vers Conflans ; elle disparait alors un moment et se montre de nouveau près de Nancy, entre Pont-à-Mousson et Pont-Saint-Vincent. Pour les géologues et les industriels, il y a là plusieurs champs d’exploitation distincts : les trois bassins français de Longwy, Briey et Nancy, les exploitations du Luxembourg et celles d’Alsace-Lorraine. C’est tout cela que les discussions politiques paraissent trop souvent confondre sous le nom, devenu populaire, de Briey, et, dans les affirmations, les calculs, les controverses que l’on porte à la tribune, on a souvent peine à reconnaître si l’orateur parle réellement de Briey, ou s’il confond, sous ce nom, la zone, hier encore allemande, de Rummelange, Hayange et Moyeuvre, ou même s’il y englobe le Luxembourg, Longwy et Nancy.

Pour préciser par des chiffres, on estime que la Lorraine désannexée pouvait tenir en réserve 2 000 millions de tonnes de minerais ; Briey et Longwy, 2 300 millions ; le Luxembourg, 300 ; Nancy, 200, et le bassin siliceux de la Crusne (Briey), 500. Ces évaluations avaient été faites par les Allemands, dans la région qui leur appartenait alors, avec plus d’optimisme que par nos ingénieurs français, et il y aurait une légère rectification à apporter en conséquence. Elles suffisent pourtant à montrer combien on a de peine à s’entendre, entre gens de très bonne foi, j’en suis convaincu, qui disent, avec une égale justesse apparente, les uns : « Les Allemands n’avaient aucun besoin de Briey pendant la guerre, » parce qu’ils envisagent seulement ici le véritable bassin de Briey français ; les autres : « Les Allemands ne pouvaient se passer de Briey pour nous combattre, » parce qu’ils prennent la partie pour le tout et que Briey, dans leur esprit, signifie « gisement lorrain. »

Il n’est pas douteux que, comme tonnage, les Allemands pouvaient, pendant la guerre, se passer des minerais français. Les 4 millions de tonnes qu’ils tiraient annuellement de France avant 1914 ne leur étaient plus ni indispensables, ni même nécessaires, alors que, ne pouvant plus exporter leur acier, ils étaient amenés à en restreindre notablement la production. De fait, il semble bien que, tout en réduisant leur propre extraction d’au moins un tiers, ils aient continué à tirer de France, durant les hostilités, à peu près ce qu’ils y achetaient auparavant : 14 millions de tonnes en quatre ans. On a donné de ce fait une explication politique : le désir de mettre en évidence