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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/416

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appartenait hier encore au fisc allemand (prussien ou bavarois). Il a donc été particulièrement simple de faire rentrer dans notre indemnité de guerre « la propriété entière et absolue, franche et quitte de toutes dettes ou charges (avec droit exclusif d’exploitation) des mines de charbon du Bassin de la Sarre. » On regrettera seulement que, d’après le texte du traité, cette propriété soit prévue seulement pour 15 ans, avec rachat possible ensuite à un prix d’expertise. Nous allons assister là, par le fait de la transaction Wilsonienne, à une expérience sociale et ouvrière d’une bien étrange complication. Verrons-nous en outre le domaine français exploiter lui-même ? Le fisc allemand a expérimenté cette solution et, malgré ses méthodes de fermeté militarisée, il est arrivé aux résultats les plus fâcheux pour le développement de la production comme pour les bénéfices financiers. Le rendement ouvrier n’excédait pas 229 tonnes par an dans les mines de l’Etat, quand il était de 260 à la mine privée Hostenbach. Le prix de revient était, dans les mines gouvernementales, supérieur de 16 pour 100 à celui des mines non officielles. Enfin, le bénéfice y atteignait a peine un mark par tonne. La rétrocession à des particuliers donnerait certainement des résultats plus favorables.

Quant aux affaires privées, elles vont suivre le sort des mines domaniales. Nous rappelons que certaines d’entre elles appartiennent déjà à des compatriotes : soit celles qui nous ont été prises en 1871 ; soit, exemple de fidélité plus remarquable, celles qui ont été ravies en 1815. L’affaire de Dilling (mines et usines) est un curieux exemple de ce dernier cas. Il y a peu d’années, la direction était encore française, les assemblées générales se tenaient en français et, aujourd’hui même, malgré la pression officielle et les efforts insidieux des Allemands pour y prendre pied, près de la moitié des actions (44 pour 100) appartiennent à des Français.

De tels exemples et le nom de Louis XIV, incrusté à jamais dans celui de Sarrelouis, suffiraient, s’il en était besoin, pour répondre à ceux qui, ayant tout oublié, se sont associés à nos ennemis et ont prétendu considérer notre revendication intégrale de la Sarre comme une fantaisie de métallurgistes.


L. DE LAUNAY.