Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/538

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

leur destinée ou s’irriter contre elle ne manquent pas de moyens pour troubler une Europe déjà troublée, pour affaiblir une Europe déjà si faible, pour diviser une Europe déjà si divisée.

N’en auraient-ils pas d’autres, qu’il leur resterait l’arme économique et la propagande révolutionnaire : car l’impérialisme économique et social allemand subsiste et c’est lui, peut-être, qui, dans les circonstances présentes, est le plus à craindre.


V. — L’IMPÉRIALISME ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

Impérialisme économique allemand. — Parmi les raisons qui ont dû déterminer le Conseil des Quatre à maintenir, sans réserve, l’unité allemande bismarckienne, l’une des principales a été, sans doute, l’avantage de pouvoir exiger, d’un bloc resté puissant, le paiement des réparations de guerre ; le chiffre de ces réparations s’élevant, en raison de la rage de destruction des Allemands, à des sommes inouïes, si l’on avait affaire à une poussière de peuples cette dette formidable eût paru compromise.

Raison assurément des plus sérieuses et d’une réalité autrement pressante et tangible qu’une thèse enseignée et diffusée, comme un dogme, par messieurs les professeurs. Ainsi, l’on en est arrivé à sacrifier beaucoup à l’unité économique allemande et, par suite, à son unité politique.

Mais une conséquence de ces ménagements apparaît aussitôt. En fait, l’Allemagne économique est à peine atteinte. Le sol allemand n’a pas été touché, sauf tout à fait au début de la guerre, dans une partie de la Prusse orientale. L’agriculture, l’industrie, le commerce n’ont perdu que relativement peu : la main-d’œuvre est, il est vrai, diminuée par la mort des hommes, mais l’Allemagne a encore une natalité très abondante, et ses pertes en hommes sont proportionnellement moins dures que celles de ses adversaires. En outre, pas une machine, pas un atelier, pas un outil n’ont été détruits du fait de la guerre. Pas un champ en friche ! Tout au contraire, l’outillage, le cheptel, le mobilier, l’argent des pays envahis, Belgique, France du Nord, Pologne, Serbie, ramassés par la cupidité sont soigneusement cachés et gardés par l’avarice teutonne. Il n’y a