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déjà ; invité à collaborer avec eux, il accepta d’être leur coopérateur en sous-ordre, « dans les choses, » écrit-il modestement, dont on le jugerait capable. » Il commença par préparer leur venue. Comme M. Vincent avait posé pour règle, que, quand ses prêtres viendraient en un endroit, les stations commencées devraient s’interrompre, Bossuet aide Mgr Bédacier de sa diplomatie pour débarrasser le terrain d’un prédicateur dominicain de la maison de Tours que l’évêque a engagé, pour le Carême, antérieurement à la démarche de la Reine mère, et qui ne veut pas s’en aller, — sans indemnité. — Bossuet se charge de l’entretenir en particulier, mais il conseille à M. Demonchy, délégué de M. Vincent, d’être bien conciliant, pour « éviter quelques murmures du peuple. » D’ailleurs c’est surtout, semble-t-il, de ses bons confrères du Chapitre qu’il se méfie ; toujours grincheux, ils n’hésiteraient guère à susciter quelques difficultés à l’évêque, dussent-ils « traverser l’œuvre. » « Je tâcherai de tout mon pouvoir de faire prendre un autre cours aux choses… Je veillerai soigneusement. » — Il aide, en même temps, le lieutenant du Roi à Metz à assurer l’installation matérielle des « Messieurs » de Paris : lits, matelas, draps et couvertures, linge de table, plats et batterie de cuisine. Il négocie avec les cuisiniers de la ville un prix raisonnable pour la nourriture : il marchande : « quarante sols par jour, c’est excessif pour Metz. » — Petits soins qui sur la simplicité de Bossuet nous édifient, et sur son côté d’homme d’affaires, nous instruisent.

Voici maintenant autre chose, dans ces lettres précieuses[1] : voici l’effet que la mission fait sur lui-même. La brave troupe est venue, malgré les inondations qui rendaient, cet hiver-là, les chemins périlleux. La prédication des « messieurs » s’est poursuivie, sous la direction de l’abbé de Chandenier, tout le carême. Bossuet remercie et félicite saint Vincent de Paul. Sans phrases, certes. « Je m’épancherais avec joie sur ce sujet-là,… » dit-il. Mais il ne s’épanche point : M. Vincent n’est-il pas « informé d’ailleurs et par des témoignages plus considérables que le sien ? » Toutefois le peu qu’il dit, gravement,

  1. Que mettra dans tout leur prix le commentaire de l’édition prochaine des œuvres de saint Vincent de Paul, préparée par les Lazaristes. — Voir dans l’édition actuelle des Lettres du Saint, t. III, 246 ; t. IV, p. 22 et suivantes ; et Bourelly, ouvrage cité.