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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/653

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biaiser, de transiger pour le succès ou par douceur humaine, pour épargner ou pour amadouer les pécheurs ? Il est très sûr que non. Une « mission, » dans l’idée, dans la haute idée que s’en fait M. Vincent, c’était, pour le fidèle, une saison de pénitence et d’humiliation, — pour les prédicateurs une opération violente et rude ; c’était, — rompant le train-train de la vie médiocre, de la routine des pasteurs et de la sécurité des troupeaux somnolents à l’envi, — le rappel à la règle rigide et, barrant la voie large, la croix. Or, que ce soit cela aussi que Bossuet ait admiré, ait aimé dans la parole des envoyés de M. Vincent, ici encore, ceux de ses sermons qui sont contemporains de la Mission de Metz ou immédiatement consécutifs nous incitent à le croire. Lisez le sermon sur la Satisfaction, prêché par lui le mardi de la Passion de 1658, vers la fin de cette mission à laquelle il s’associe en disciple, en émule. Sur toutes les questions relatives à la réparation par le pécheur du mal qu’il a fait, partout, c’est le point de vue sévère. On demande si la « satisfaction » est nécessaire ? Belle question ! Allez la poser aux saints pénitents de la primitive Eglise ! « Il n’en faut point d’autre preuve que leurs exemples. » Avec eux on doit se convaincre « que, pour se relever de la chute où le péché nous a fait tomber, il ne suffit pas de changer sa vie ni de corriger ses mœurs déréglées : il faut réparer. » « Il ne suffit pas de ne plus faire de nouvelles dettes envers la justice divine ; il faut payer les anciennes. » Désirer de ne plus pécher, regretter d’avoir péché, c’est bien ; mais à ces sentiments doit être liée la volonté de satisfaire : « ces choses sont inséparables. » Si quelques casuistes ont dit que la satisfaction n’est pas nécessaire « de la nécessité du sacrement de pénitence, » la définition que Bossuet donne de ce sacrement en s’inspirant de saint Augustin et de saint Prosper, implique au contraire, la nécessité impérieuse et fondamentale de la satisfaction. Du moment où « le sacrement de la pénitence est un échange mystérieux qui se fait, par la bonté divine, de la peine éternelle en une peine temporelle », la satisfaction, peine temporelle, devient indispensable. Elle est une condition du « compromis. » « La réconciliation ne se fera pas, pécheur, si tu rejettes cette condition. »

Elle ne se fera pas non plus, confesseur, si tu ne l’imposes pas. Et l’austère leçon de Bossuet vise et poursuit le prêtre