Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/669

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

toutefois envoyée des États-Unis et de la Grande-Bretagne, ce qui diminuait d’autant le prélèvement à opérer sur nos stocks. D’ailleurs, cette cause de renchérissement disparaît rapidement. La presque totalité des troupes alliées aura bientôt quitté notre territoire. D’autre part, notre démobilisation se poursuit : chaque mois, de nouvelles classes regagnent leurs foyers, rentrent aux champs ou à l’usine ; les soldats consommateurs redeviennent des paysans et des ouvriers producteurs.

Ailleurs, le phénomène est moins sensible : la vie est moins chère en Angleterre qu’en France, et cela pour une triple raison : le sol national est resté vierge de toute invasion ; la proportion de la population appelée à servir a été moindre que chez nous ; enfin, les transports maritimes, malgré les torpillages subis par la flotte britannique, sont restés plus abondants et à bien meilleur compte vers les ports du Royaume-Uni que vers les nôtres. L’opinion se préoccupe d’écarter tout ce qui est de nature à faire obstacle au retour à des prix raisonnables. Le journal l’Economist poursuit une campagne en ce sens et affirme que le meilleur moyen de réussir est de supprimer les barrières mises pendant la guerre à l’importation. Il demande le renvoi des fonctionnaires improvisés depuis 1914 et qui semblent avoir, du premier coup, adopté tous les défauts des gens du métier. Il va jusqu’à accuser les industriels, temporairement investis de l’autorité publique, d’abuser de leur pouvoir pour s’opposer au rétablissement de la liberté commerciale. Et cependant, les chiffres qui marquent la hausse sont bien plus faibles dans le Royaume-Uni que chez nous : de juillet 1914 à juin 1918, le coût moyen de l’existence ne s’est élevé que de 74 pour 100, alors qu’il triplait chez nous.

En Belgique, où les prix avaient subi une hausse formidable pendant l’occupation allemande, nous assistons, depuis le commencement de l’année, à une baisse continue. Une enquête poursuivie à Bruxelles au mois de juin 1919, démontrait qu’il était possible de se procurer pour vingt francs un ensemble de denrées alimentaires qui en coûtaient cinquante le 1er janvier dernier, c’est-à-dire que la baisse a été de 60 pour 100. Ce résultat a été obtenu grâce au système que M. Jaspar, ministre des Affaires économiques du royaume belge, qualifiait pittoresquement du système de liberté jusqu’à la corde. Nos alliés n’ont pas hésité à s’approvisionner au dehors : grâce à des arrivages