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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/681

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c’est que nous nous rapprochons chaque jour du but, quelqu’éloigné qu’il puisse encore paraître. Si nous assistons depuis plusieurs mois, contrairement à l’attente générale qui était parfaitement fondée, à une hausse nouvelle, c’est que d’autres causes ont agi en sens inverse et que leur effet a non seulement paralysé celui des causes qui devaient provoquer la baisse, mais qu’il a été plus puissant et qu’il a déterminé le mouvement contraire. C’est la détérioration de notre monnaie à laquelle nous devons l’imputer ; et, comme cette détérioration est due à l’intervention du gouvernement, c’est à la gestion de nos finances que nous devons remonter pour découvrir la source du mal dont nous souffrons.

Les dépenses excessives votées depuis l’armistice ont grossi le fardeau budgétaire de telle façon que l’équilibre a été brusquement rompu. Tous les hommes sensés étaient convaincus que la cessation des hostilités marquerait le retour à un autre état de choses, et en premier lieu la fin des libéralités inconsidérées faites à certaines catégories aux dépens de l’universalité des citoyens. Le Parlement a entendu à cet égard des paroles mémorables, qui n’ont pas seulement stigmatisé les erreurs présentes, mais qui ont fait justice du passé. M. Brousse, le 10 juillet, s’est écrié à la tribune : « C’est cette prodigalité, cet argent follement répandu parmi les sursitaires des usines qui l’ont dépensé sans compter, ces salaires élevés donnés aux mobilisés retirés du front, salaires cumulés souvent avec des allocations injustement distribuées, c’est cet argent gaspillé en achats souvent inutiles et en dépenses fréquemment injustifiées qui a été la cause initiale de la vie chère. »

Cette politique est d’autant plus dangereuse que les mêmes députés et sénateurs qui votent sans sourciller des milliards de crédits ne se résolvent pas aisément à établir des impôts nouveaux ni à augmenter ceux qui existent. Ils font des objections, souvent très sages, aux projets-que le gouvernement leur soumet à cet égard : mais alors, ils ne devraient pas approuver des dépenses en face desquelles ils ne créent pas de recettes. C’est une aberration que de croire qu’on équilibre un budget au moyen du papier-monnaie. Celui-ci n’est qu’un emprunt, et de la pire espèce, parce qu’il vicie le système monétaire dans lequel il est introduit en excès. Il a beau sembler ne pas coûter d’intérêt ; il fait perdre à la nation des