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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/711

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de notre ancienne armée. On applaudit le costume pittoresque des Highlanders d’Ecosse, admirables soldats, comparables à nos alpins, et dont l’allure est rythmée par les chevrotements aigus d’une cornemuse pareille à notre biniou breton. Les hardis chasseurs du Somerset, les rifles des régiments d’York, de Lincoln, de Liverpool, de Dorset, les grenadiers du Northumberland, les fantassins du comté de Lancastre, tous les bons Tommies, célébrés par Kipling, ont leur part d’acclamations.

Une musique alerte, vivement cadencée. Le drapeau vert, blanc et rouge, avec l’écusson de Savoie. C’est un détachement du 2e corps de l’armée italienne qui, pendant la campagne de 1918, prit une part active aux opérations de la bataille de Champagne. On fait un accueil fraternel aux couleurs de l’Italie, présentées par les porte-drapeaux des brigades d’infanterie de Naples, de Brescia, de Salerne, que suivent les enseignes de deux régiments d’artillerie de campagne et d’un groupe de bataillons d’assaut.

Un étendard d’argent, irradié de pourpre par les rayons d’un disque solaire, accompagne les Japonais. Un beau détachement de l’armée hellénique, arborant le drapeau bleu, croisé de blanc, est accueilli par les cris de « Vive Venizelos ! Vive la Grèce ! » L’aigle blanc de Pologne, les enseignes de la République portugaise et du royaume de Siam, la bannière de saint Wenceslas, portée fièrement par les Tchéco -Slovaques en béret bleu, nous apportent tour à tour le touchant témoignage des amitiés groupées autour de nous, dans la guerre et dans la paix. Le jeune colonel qui conduit les Roumains montre un profil antique sous son casque de légionnaire du temps de Trajan. On salue le drapeau d’azur, d’or et de pourpre qui, chez nos alliés de Roumanie, a plané sur tant de misères, volontairement subies, courageusement acceptées. La Serbie décimée, ravagée par sept années de guerre, d’oppression, de famines, de dévastations, nous a envoyé, pour occuper la place qu’elle a méritée largement dans ce triomphe, une élite d’officiers et de soldats qui inclinent pieusement devant nos morts leurs drapeaux déchirés et leurs armes victorieuses.

Un temps d’arrêt. Un intervalle de silence. Les généraux, les délégations, les compagnies d’honneur, les drapeaux des armées françaises vont passer sous l’Arc de Triomphe. Quelle émotion nous étreint, à la vue de nos trois couleurs, toutes vibrantes et rayonnantes dans le matin clair ! L’Arc ensoleillé resplendit comme un tabernacle dans une auréole. Et voici que, dans le silence pathétique,