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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/714

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La musique des équipages de la Hotte précède l’amiral Ronarc’h, qui s’avance à pied, en tête de la garde du drapeau des fusiliers-marins de Nieuport, de Dixmude, de Hangard-en-Santerre.

Fanfare. Ce sont les étendards de nos régiments d’artillerie, ornés de la fourragère aux couleurs de la croix de guerre, de la médaille militaire ou de la Légion d’honneur. Les batteries montées, les batteries lourdes, les batteries de montagne sont acclamées. Le 75 et le 155 court défilent sous des yeux qui savent la part que nos artilleurs ont prise à la grande œuvre de la victoire. Une sonnerie de trompettes, dont les notes stridentes sont répercutées par les voûtes sonores de l’Arc de Triomphe, annonce les cavaliers de Saumur et les étendards des chasseurs d’Afrique, des hussards, des chasseurs à cheval, des spahis, des goumiers algériens et marocains, des dragons, des cuirassiers qui souvent et longtemps, au cours de cette guerre, ont combattu à pied dans la tranchée.

Enfin, après tous ces tableaux d’histoire, pareils aux groupes d’un bas-relief antique ou aux strophes d’une ode triomphale, voici une vision qui mêle aux souvenirs des plus anciennes guerres les récentes inventions.de la science moderne. C’est le défilé des chars d’assaut, avec leurs fanions. Tel de nos jeunes porte-fanions s’appuie sur sa hampe avec un geste de triomphateur antique. Le général Estienne commande ce détachement, entouré d’une escorte choisie parmi les combattants qui, par l’avance irrésistible de leurs « tanks, » ont broyé les fils de fer barbelés et ouvert par la rupture des lignes allemandes le chemin de la victoire.

Et, maintenant que tous les drapeaux, toutes les épées, toutes les âmes, en ce triomphe, ont salué les morts et donné aux vivants, par l’évocation des plus hauts exemples, un renouveau de force morale pour le labeur de demain, mettons-nous à l’œuvre, tous, afin que soit digne de cette victoire la paix conquise par une merveilleuse émulation de vertus françaises. Si les yeux qui ont vu cela ne gardaient pas intacte l’impression de ces heures bénies et splendides, ils n’auraient plus qu’à se clore à la lumière du jour, car ils ne verront plus jamais rien d’aussi beau.


GASTON DESCHAMPS.