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un pays confédéré, c’était la confédération type, la confédération modèle, le « Saint-Empire de la Paix. » Et cette constitution de l’Allemagne apparaissait comme l’un de ces règlements raisonnables du problème de la juxtaposition des races.

En général, le système de la Confédération était considéré comme excellent et les techniciens de la politique l’envisageaient comme une solution enviable.

Machiavel avait dégagé son caractère pacifiste et anti-impérialiste : « Si, dit-il, le moyen des confédérations est, en lui-même, un obstacle à des conquêtes, il en résulte deux avantages : le premier, c’est d’avoir rarement la guerre, le second, la facilité de conserver ce que l’on peut avoir acquis... L’expérience nous apprend, d’ailleurs, que cette espèce de corps politique a des bornes. Il se compose de la réunion de douze ou quatorze États, tout au plus. »

Montesquieu, qui contemplait d’un œil si dégagé les lois et es coutumes régissant le monde politique, écrivait : « Il y a une grande apparence que les hommes auraient été obligés, à la fin, de vivre sous le gouvernement d’un seul s’ils n’avaient imaginé une manière de constitution qui a tous les avantages intérieurs du gouvernement républicain et la force extérieure (pour la défensive, comme il va l’expliquer) du monarchique. Je parle de la République fédérative... Cette sorte de République, capable de résister à la force extérieure, peut se maintenir dans sa grandeur sans que l’intérieur se corrompe. La forme de cette société prévient tous les inconvénients... » On voit que Montesquieu ne s’en tient pas à constater les avantages du système fédératif : il le propose comme un idéal.

Et c’est, finalement, le couronnement de l’œuvre philosophique du XVIIIe siècle. La polémique de Jean-Jacques Rousseau n’a pas d’autre sens que d’ouvrir les voies à un système fédératif, soit national soit international. Il écrit, dans son Gouvernement de Pologne (chap. IV), cette phrase qui résume son effort : « Appliquez-vous à étendre et à perfectionner le système des gouvernements confédératifs, le seul qui réunisse les avantages des grands et des petits États. » Jean-Jacques fut, comme on le sait, un des prophètes de la Société des Nations. Il fit, avec insistance, l’éloge de l’abbé de Saint-Pierre. Le livre auquel il mit la main jusqu’à la mort et connu sous le nom de