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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 52.djvu/791

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le sens des ententes internationales ; les peuples s’étaient habitués à traiter beaucoup de leurs grandes affaires en commun : monnaies, postes, transports, câbles, commerce, hygiène, finances, emprunts, réglementations des conditions de la guerre, puis des conditions de la paix, enfin traités d’arbitrage, conférences de La Haye, cour de La Haye, etc., etc.. « L’histoire européenne était, depuis un siècle, en marche vers cet idéal ; si elle reprenait sa route aussitôt la fin des hostilités, la guerre actuelle découvrirait son sens profond... Une secousse formidable déchirait la terre, mais c’était pour jeter les bases de l’ordre futur. »

Enfin, on en était arrivé à la conviction, éminemment moderne et « parlementaire, « que les difficultés humaines s’arrangent à être « parlées, » que tout le monde a plus d’esprit que M. de Voltaire, et que la publicité, avec la pénétrante curiosité de la presse, est capable de résoudre les problèmes les plus complexes mieux que les augures et les pontifes qualifiés.

En un mot, l’opinion, « reine du monde, » voulait prendre en mains le gouvernement de l’humanité.

Une fois cette décision prise par elle, les cabinets n’avaient plus qu’à se laisser conduire.

Cependant, ils ne réagirent pas tous de la même façon.


L’opinion américaine et la Société des Nations. — Le président Wilson fut, tout de suite, parmi les plus ardents. Dès qu’il eut arrêté sa résolution de demander au peuple américain le renouvellement de son mandat pour déclarer l’intervention de l’Amérique dans la guerre (septembre 1916), il avait indiqué « la nécessité, pour les nations du monde, de s’unir afin de se garantir mutuellement que tout ce qui serait susceptible de troubler la vie du monde serait soumis au tribunal de l’opinion mondiale avant de recevoir un commencement d’exécution. » Il ne s’agissait encore que d’une procédure.

Mais l’idée se précisa ; elle s’affirma, le 22 janvier 1917, dans le discours prononcé au Sénat « sur les Conditions d’une Paix permanente » : « Dans toute discussion de la paix qui doit mettre fin à la présente guerre, on peut poser en principe que cette paix doit s’accompagner de l’institution bien définie de quelque force collective, laquelle rendra virtuellement impossible que pareille catastrophe nous accable jamais de nouveau ».