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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 54.djvu/195

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a été factice la combinaison allemande, grâce à laquelle on a réussi à vendre très cher et à faire considérer comme rare une substance, en réalité aussi abondante que la potasse. Il se passe lace que nous retrouverons tout à l’heure pour la soude. Dans un cas comme dans l’autre, des artifices commerciaux, compliqués de fiscalité, ont réussi à faire payer un prix excessif une substance indispensable, dont les réserves naturelles suffiraient, si on laissait le marché libre, à alimenter largement et économiquement nos besoins. Ne l’oublions pas dans nos calculs d’avenir au moment où nous allons nécessairement ébranler ce château de cartes et où les exploitations espagnoles vont le secouer à leur tour.

Ainsi Stassfurt seul a été considéré comme contenant quelques 15 ou 20 milliards de tonnes de sels potassiques : soit assez de minerais pour atteindre rapidement, comme chiffre de vente, 600 millions par an (aux cours d’avant-guerre), un milliard annuel peu d’années après et pour alimenter, dans ces conditions, la consommation mondiale pendant cinq siècles. J’ai dit que l’Alsace pouvait contenir 1 500 millions à 2 milliards de tonnes de sels potassiques, ou 300 à 400 millions de tonnes de potasse pure : soit encore trois siècles de consommation mondiale. Maintenant, on nous affirme que le gisement espagnol de Cardona peut renfermer 100 ou 150 millions de tonnes. Je laisse de côté les gisements abyssins, insignifiants à côté de ces chiffres avec leurs 20 000 tonnes d’extraction annuelle, comme ceux des États-Unis, bien pauvres jusqu’à nouvel ordre et, d’ailleurs, réservés à la consommation d’un autre continent. Voilà donc, sans escompter aucune découverte future, la consommation du monde assurée pour un nombre de siècles sur lequel nous ne sommes guère accoutumés à spéculer en industrie minérale.

Examinons encore, puisque nous sommes désormais intéressés comme producteurs et non plus seulement comme consommateurs, la méthode commerciale suivie jusqu’ici. La politique du « Kali » allemand a consisté sans doute à développer la consommation par une propagande très habile, et on y a réussi dans une large mesure, puisque la vente des sels potassiques a doublé tous les sept ans depuis la mise en valeur de Stassfurt en 1861, suivant une loi dont on connaît les effets rapides dans le problème classique des grains de blé sur les cases d’un échiquier. Mais, en même temps, on s’est attaché à éviter la surproduction