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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 54.djvu/347

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l’armée française, s’associaient, par ailleurs, au mouvement de la 5e armée britannique au Sud. Ce mouvement portait notre gauche de la région de Gand sur Bruxelles. La cavalerie serait lancée aux trousses afin de transformer en déroute la retraite des Allemands sur le Brabant et la Basse-Meuse.

En fait, tout se préparait pour que, chassé de France, à quelques lieues carrées près, en cette soirée du 10, l’ennemi s’il ne se décidait pas à capituler, fut pris entre la Basse-Meuse et la Sarre dans les bras d’une gigantesque manœuvre. Nous savons que tout était amorcé pour que cette manœuvre jouât entre le 12 et le 15. Tandis que Degoutte, se rabattant sur la région de Bruxelles, de, Tirlemont, de Liège, représenterait, en cette formidable étreinte, le bras gauche, Castelnau actionnerait vers la Sarre et la Moselle le bras droit, pendant que, se débattant dans le massif d’Ardennes, l’ennemi y serait accroché par les douze autres années assaillantes.

Ce soir au 10, tout était en mouvement et les seules armées immobiles, — celles de Lorraine, — attendaient, ayant déjà pris leur dispositif, et toutes frémissantes d’ardeur quand sonnerait, le 13, l’heure de la grande attaque enveloppante.

L’ennemi n’attendit pas l’heure. Il était, dès le 9, résolu à traiter à tout prix. N’étant pas gens à sauver leur honneur, ils ne comptaient point imiter les Français de 1870. Ils avaient leur Sedan, — un gigantesque Sedan où ils laissaient le tiers de leur armée : ils firent ce que leur conseillait la prudence, — après tant d’outrecuidance. Ils allaient, sans essayer de combattre plus longtemps, signer, l’expression s’explique, une capitulation en rase campagne.


LA CAPITULATION
11 NOVEMBRE

La nuit du 10 au 11 novembre 1918 fut légèrement brumeuse ; la pluie avait cessé ; les chemins restaient boueux, piétinés successivement par l’armée poursuivie, par l’armée poursuivante. Le soleil se leva dans un léger brouillard.

Dans la nuit humide, on eût entendu bruisser une masse d’armes ; le canon tonnait sur toute la ligne de Sedan à Gand en passant par le Sud de Rocroi, l’Est du Cateau, l’Ouest de Maubeuge, l’Est de Mons et d’Ath ; sur toute cette ligne les