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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 54.djvu/464

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Si donc l’effort de nos Alliés britanniques pour la victoire a été, à beaucoup d’égards et en valeur absolue, inférieur à celui de la France qui reste la « grande blessée, »... peut-être aussi la « grande sacrifiée » de la guerre, il n’en représente pas moins au point de vue de la progression, si j’ose dire, au point de vue du chemin parcouru entre le départ et l’arrivée au point de vue de ce que les physiciens nomment l’accélération, un monument d’énergie militaire incomparable.

Ce n’était point une mince affaire que de démobiliser tous ces soldats improvisés ; on l’a bien vu chez nous. Le très honorable sir Robert Horne est même d’avis, ainsi qu’il a bien voulu me l’expliquer dans son cabinet de Whitehall, que le problème de la démobilisation était encore plus ardu en Angleterre qu’en France.

Sir Robert Horne, comme tous ceux de ses collègues du ministère anglais à qui j’ai eu l’honneur de serrer la main, offre une apparence, en vérité surprenante pour des regards parisiens, de jeunesse, de robustesse et pour tout dire d’un vilain mot qui représente une bien jolie chose, — de « sportivité. »

Cet aspect athlétique, cette élégance musclée des hommes politiques de l’Angleterre, qu’on retrouve chez ses grands hommes d’affaires, chez la plupart de ses grands administrateurs, chez ses grands chefs militaires et navals, — si élevé que soit leur grade et leur âge, — sont une des choses les plus frappantes pour un Français. Elle est évidemment la conséquence des habitudes sportives maintenant innées chez les Anglo-Saxons et qui ne sont encore qu’exceptionnelles chez nous.

On m’a dit qu’aux États-Unis les ministres s’astreignent chaque matin à faire des exercices gymnastiques avant le labeur politique. C’est une habitude excellente. D’abord, pendant cette réunion préliminaire, les hommes d’État ne font manifestement aucune de ces choses qui, ensuite, peuvent être dommageables à leurs concitoyens. Puis et surtout, l’assouplissement du corps assouplit l’esprit. A condition de le pratiquer avec modération (l’exemple des anciens Grecs le prouve bien), à condition de le considérer comme une fin et non comme un moyen, le sport est, à tous les âges et surtout à un certain âge, le succédané moderne de la fontaine de Jouvence.

Il est évidemment pour beaucoup, avec les habitudes d’hygiène qui en dérivent, dans la magnifique allure physique, dans la longévité moyenne supérieure à la nôtre, dans la faible morbidité du peuple britannique. Le samedi après-midi surtout, dans tous les parcs, sur toutes les pelouses, sur tous les terrains de jeu de l’Angleterre, on a