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ce voyage, en même temps que la notion des modifications à apporter aux méthodes défensives en usage, des vues plus nettes sur la situation générale. Le tableau qui a été fait de la bataille de la Somme n’a pas laissé de l’impressionner et de lui montrer un avenir assez sombre. Aussi, dès son retour, présente t-il au Chancelier d’Empire une liste imposante des efforts à faire par l’Allemagne, dans tous les domaines — matériel et moral, — pour gagner la guerre. Ce sera l’occasion de ses premiers différends avec le Gouvernement.

Son domaine, resté jusqu’ici à peu près exclusivement militaire, s’élargit considérablement ; il s’étend peu à peu à toutes les questions de politique extérieure, de politique intérieure et à l’administration. Ludendorff discute les conditions de la paix à offrir aux Alliés, — car on parle déjà de paix en 1916 ; — il prend part aux conférences qui aboutissent à la déclaration officielle de la guerre sous-marine à outrance ; il suggère un projet de loi sur le service militaire obligatoire pour tous les hommes de 15 à 60 ans et même pour les femmes ; il intervient dans toutes les questions de ravitaillement, de transport, de répartition des matières premières, de presse, de propagande, de répression des troubles révolutionnaires. Sa trace est partout, et à peu près nulle part elle ne se confond, quand elle ne la traverse pas, avec celle du Gouvernement. Si sa popularité est grande, ce n’est ni dans les milieux gouvernementaux, ni dans les partis parlementaires qui donnent leur appui au Gouvernement.


Avec la fin de l’année 1916 qui voit l’écrasement de la Roumanie, Ludendorff essaie de parler en maître dans le règlement de l’administration de la Valachie conquise, et il y parvient, mais en mécontentant Bulgares et Autrichiens.

En même temps, se pose pour lui le problème de la campagne de 1917. De l’exposé de la situation générale, il conclut que l’Allemagne ne peut rien faire de mieux que de rester sur la défensive en attendant que la guerre sous-marine sans restriction donne les résultats que le grand amiral annonce. Il ne craint même pas, en approuvant cette tactique, de provoquer l’entrée en guerre des États-Unis, puisque les troupes américaines ne peuvent rien faire de sérieux avant un an et que, dans un an, les sous-marins, ayant fait leur œuvre, l’Angleterre