Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 54.djvu/785

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de faire une démarche isolée auprès de l’Entente. La Bulgarie, toujours plus exigeante en subsides et en livraison, de marchandises, excipe de l’épuisement de son armée pour ne plus rien faire et former un ministère favorable à l’Entente. La Turquie enfin, engagée au Caucase dans une guerre de massacres et de pillages, y contrarie sans cesse les projets allemands et répond avec le flegme et l’inertie bien connus des Orientaux à toutes les objurgations qui lui sont adressées.

Septembre voit se renouveler toutes les attaques, depuis la Scarpe jusqu’à la Vesle. Le 12, les Américains réduisent, en une seule et brillante opération, tout le grand saillant de Saint-Mihiel.

Le 15 septembre survient l’offensive alliée en Macédoine, suivie presque aussitôt de la débâcle bulgare. Ludendorff ne trouve pas de termes assez forts pour stigmatiser la conduite de deux divisions bulgares et de ceux des chefs de cette armée qui « ne sont pas assez vite à leur gré arrivés à se jeter dans les bras de l’Entente. » La Turquie est maintenant menacée, la neutralité de la Roumanie compromise. Ludendorff perd pied ; il renouvelle au gouvernement sa demande d’armistice immédiat et propose de la faire passer par l’intermédiaire du président des États-Unis. Il essaie cependant de parer à tant de désastres effectifs ou trop faciles à prévoir en dirigeant sur Sofia et Nisch les quelques divisions dont il peut encore disposer dans l’Est ; il dérive même sur ces points des troupes en cours de transport vers la France, car il lui faut arrêter l’ennemi su moins sur le Danube ; sinon, la Hongrie, à son tour, pourrait être envahie, et ce serait la fin de l’Autriche.

Le comble au désarroi est mis par l’extension subite de la bataille de France, d’une part à travers la Champagne jusqu’à la Meuse, et, d’autre part, de la Scarpe à la Mer du Nord. Le 26 septembre, en effet, les Américains attaquent entre la Meuse et l’Argonne, les Français en Champagne ; le 27, les Anglais marchent à nouveau sur le front entre le Catelet et Cambrai ; les 28 et 29, de concert avec les Français, sur le front le Catelet-Saint-Quentin ; le 28, un groupe d’armées anglo-Franco-belge débouche entre la Lys et Dixmude. A peu près partout, les Allemands cèdent le terrain. Cela décide Ludendorff à accéder à l’idée de l’évacuation des territoires français et belges occupés par les armées allemandes, si telle est l’exigence du président Wilson.