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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 54.djvu/842

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et double est mon anxiété. Je ne sais plus que faire, que devenir. Cet état est accablant.

Je viens d’envoyer la Com(édie) Hum(aine) à Villemain et il m’a répondu la spirituelle lettre avec laquelle j’envelopperai ce paquet.

La princesse de Canino veut que je lise (chez elle) l’affreuse tragédie de (son mari) : Clotaire, et je ne puis pas refuser cette satisfaction à une si aimable vieille femme. Ce sera pour dans douze jours. Je suis enrhumé comme le Père Ducantal, des Saltimbanques.

J’ai Etex à déjeuner, et je te quitte. Le voici.


Lundi (24 février).

Pas de lettres ! Que se passe-t-il ? Y a-t-il en Saxe une révolution comme en Suisse ? Les chemins sont-ils gelés, les malles-postes sans chevaux ? Hélas ! hélas !

Etex va me faire la table pour le dessus en malachite d’Anna. Il fera Séraphita, Madame de Mortsauf, la belle Imperia et Pierrette. Ce sera en bronze doré, avec des attributs. Dutacq m’a amené quelqu’un hier qui me sera précieux pour l’achèvement de ma liquidation ; mais je ne travaille pas et je ne m’amuse pas ; c’est-à-dire je me fatigue en pure perte. Oh ! chère, si vous pouviez être témoin des dégâts que fait l’absence de votre petite écriture fine, vous écririez bien régulièrement toutes les semaines !


Mardi (25 février).

Enfin Gavault est venu ! (II) a dit pour sa défense qu’il voulait avoir lu les Paysans avant de venir. Il approuve l’acquisition d’un arpent de Monceaux en échange des Jardies et il va s’occuper des pièces nécessaires à la consommation de la vente des Jardies. Ses mines à Livourne vont bien. Je l’ai trouvé froid. Mme de B(rugnolle) dit qu’il se moque beaucoup de mes espérances, de mes payements. Et la raison de cela, c’est que M. Gav(ault) n’a jamais été aimé et n’a pas d’énergie. Il a, comme moi, sa fortune à faire, et il est sans activité. Ce qui m’arrive avec Gavault m’est arrivé avec tout le monde (hommes).

On est humilié à trouver tant de courage, d’activité, de persistance et on finit par prendre en haine ce qu’on envie. Un homme comme moi doit rester seul dans sa tanière, et c’est ce que je compte pratiquer avec mon louloup.