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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 54.djvu/874

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aux projets financiers d’Erzberger et en apportant sur l’autel de l’unification de l’Empire le sacrifice de leurs prérogatives financières. Pour tous ceux qui ont suivi, depuis la fondation de l’Empire, les efforts du pouvoir central en vue de restreindre ces derniers vestiges de la souveraineté, la ténacité avec laquelle les États défendaient la disposition de leurs ressources financières en dehors de la contribution matriculaire, participation aux dépenses communes, rien ne sera plus caractéristique que ce renoncement.


DEMAIN ?

Et maintenant, que nous réserve l’avenir ?

De la tempête sort une Allemagne plus unifiée que jamais. Les nations, comme les humains, s’enfantent dans le sang et dans la douleur. Les événements de 1870 à 1871 n’avaient été qu’un prélude. Il eût été trop beau que quelques jours pussent faire disparaître la trace de divisions millénaires. L’unité germanique n’était que dégrossie. Le particularisme, représenté surtout par les dynasties particulières et leur clientèle, avait laissé de fortes pailles dans le bloc métallique, œuvre de Bismarck. Le puissant forgeron n’avait pu produire qu’une ébauche. Il fallait la tremper. Rien ne vaut dans le creuset, pour cette opération, le deuil et la souffrance. Le bloc germanique né de la révolution du 9 novembre, aujourd’hui encore en travail de refroidissement, va se présenter dans quelque temps comme une œuvre achevée et homogène. Les corps étrangers qui s’attachaient à ses flancs, les nationalités hostiles et irréductibles qui, malgré toute apparence, malgré les paroles de Bismarck sur l’Alsace-Lorraine, dans le martyre de laquelle tous les peuples allemands communiaient, étaient des éléments de faiblesse. Libérée d’eux, l’Allemagne représentera au centre de l’Europe une masse compacte redoutable. L’Autriche ne peut manquer de se souder dans un délai plus ou moins long. Nous l’avons laissée beaucoup trop faible pour qu’elle puisse vivre isolée, au milieu de nations nouvelles ne pouvant oublier ce qu’elles en auront souffert. S’il est vrai qu’aucune disposition écrite n’aurait pu empêcher à perpétuité une Allemagne disloquée de se reconstituer, les traités de 1919 ne font rien pour retarder ce moment, pour assurer un délai qui aurait au moins