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Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 54.djvu/873

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trains, les soldats venus d’Allemagne continuent à se déverser en Courlande ; le gouvernement se lamente sur l’impossibilité de garder ses frontières ; von der Goltz, trop compromis, se décide à rentrer. Il lance des proclamations subversives, en opposition avec les ordres reçus de son gouvernement, avec les engagements qu’a pris celui-ci, il ne reçoit même pas un blâme de son ministre, pas un jour d’arrêt. C’est à douter, malgré tout désir contraire, qu’il y ait au gouvernement un seul homme de bonne foi. Sinon, comment peut-il accepter cette situation humiliante ?

Sans doute le gouvernement actuel ne tient que grâce à l’armée et aux généraux et doit leur faire des concessions. Sans l’appui des anciens officiers, il croule sans rémission. Ceux-ci, qui savent qu’une tentative de restauration monarchique serait prématurée, s’accommodent d’avoir provisoirement la puissance sans l’étiquette. Leur jour viendra. Mais combien peu de caractère chez ceux des ministres qui ne sont pas complices ! Dès qu’ils ont la velléité de faire preuve d’un esprit nouveau, ils sont brusquement arrêtés par le veto de l’opposition. Les effets de leurs déclarations ne dépassent pas les murs du Reichstag, siégeant maintenant. à Berlin et qui est le plus souvent un désert, même aux plus importantes séances, car l’Allemagne n’a pas pris au sérieux le parlementarisme.

La constitution de l’armée se perfectionne. Tout se prépare pour l’organisation militaire nationale en marge du traité. Tout cela pourra s’assoupir, se dissimuler pendant la présence des commissions de Contrôle. Elles parties, tout sortira du sommeil.

Ce serait un leurre de croire les Allemands disposés à appliquer les conditions de la paix. Ils l’ont avoué eux-mêmes. « Nous signons le couteau sur la gorge, mais c’est inexécutable. » Il sera curieux de suivre cette application dans l’exécution de ses clauses à réalisation immédiate : le désarmement, la démobilisation, surtout la livraison des coupables. On y trouvera le critérium de leur bonne foi et de leur bonne volonté.

Quant au mouvement fédéraliste, il n’en est plus question nulle part, en dehors des régions occupées. Après avoir sacrifié tous les restes de leur autonomie, les États secondaires viennent de mettre le point final à leur abdication en souscrivant