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après la victoire la dualité d’étiquettes. Les catholiques furent sollicités d’adhérer aux organisations qui se fondaient en Alsace. Ils aimèrent mieux contribuer à la coalition de toutes les forces locales. Elle leur semblait nécessaire pour faire face aux difficultés de la période de transition, plus nécessaire encore pour ôter aux Allemands le moyen d’interpréter à leur profit une divergence apparente. L’Union républicaine, où, vinrent siéger côte à côte, oublieux de leurs querelles, les chefs du Bloc et ceux du Centre, fut ainsi créée, dans une pensée commune de dévouement à la Lorraine et à la France.

Le pacte était solide, car il a résisté à l’épreuve la plus redoutable : la liste soumise aux suffrages des électeurs fut élaborée sans que l’entente fût ébranlée. Pour les huit sièges dont disposait le département de. la Moselle, vingt-huit postulants, tous honorables et la plupart connus, réclamaient l’appui de l’Union. Les rivalités de personnes, de cantons ou de journaux rendaient impossible que le Comité central, en faisant son choix, évitât pleinement les critiques.. Des incidents se sont produits ; ils sont sans intérêt ; le désir mutuel d’aboutir, le désistement volontaire de quelques-uns des candidats d’abord proposés, l’effort de conciliation réalisé par M. le chanoine Collin ont finalement assuré la confection d’une liste où l’opinion trouvait le reflet exact de ses sentiments.

Deux noms lui donnaient tout son sens. Celui du général de Maud’huy, né à Metz, premier gouverneur français de la ville délivrée, n’a pas besoin qu’on le commente ; il fallait qu’il fût là pour que l’Allemagne et l’Europe ne pussent douter de la volonté du pays : les annexés d’hier, a dit le Lorrain, « se devaient d’envoyer à la Chambre un des leurs dont la vie entière avait eu pour but unique la Revanche. » Aux côtés du général le simple ouvrier typographe, président du Souvenir français ; ce n’était pas un moindre symbole ; l’un, quittant la terre familiale après 1871, officier d’élite, chef aimé entre tous, avait préparé dans l’armée libératrice la victoire militaire ; l’autre, fixé au sol, en travaillant à maintenir parmi ses compatriotes durant la longue attente le culte du passé, avait préparé la victoire morale ; Jean, qui créa l’œuvre des tombes, qui prit l’initiative de déployer sur les catafalques aux fêtes commémoratives le drapeau tricolore, l’instigateur du monument de Noisseville, avait sa place nécessaire parmi les élus de Metz.