Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 54.djvu/95

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Anglais étroitement unis (et Foch appelait à cette heure à cette nouvelle Bataille des Flandres deux divisions américaines), se portèrent, la main dans la main, à l’assaut, tandis que les aviations des trois armées faisaient merveille, bombardant rassemblements ennemis et trains en marche, mitraillant de près l’infanterie ennemie que les chars écrasaient ; cependant, la marine britannique prenait déjà, à la gauche de l’armée Franco-belge, sa part à l’action étendue cette fois jusqu’à la mer. A la fin de la journée, on avait emporté Costemark, Hooglede, Morsleede, et, au centre, Roulers, objectif qui si souvent avait été visé et jamais n’avait été atteint depuis octobre 1914. Le front était de ce fait, porté à la ligne Costemark-Beveren-lisière Ouest d’Iseghem et à la Lys entre Menin et Werwicq. A la vérité, c’était une mer de flammes que nous conquérions, car les Allemands, fidèles jusqu’au bout à leurs sauvages pratiques, avaient mis le feu non seulement à Roulers et à Menin, mais à des centaines de villages et de fermes ; le soir du 14, le ciel, déjà embrasé au-dessus de nous, s’embrasait devant nous ; l’ennemi lui-même accusait sa défaite et presque la précédait en mettant également le feu à Thourout, Lichtervelde et Thielt, pour deux jours encore dans ses lignes. Le cœur se serrait à la vue de ces manifestations d’une barbarie si atrocement entêtée à détruire. Est-ce ainsi que les précieuses villes de Gand et Bruges seraient traitées ? On n’y voyait à la vérité qu’une raison de plus de pousser vivement l’avance.

La menace suspendue sur la tête des Allemands était redoutable. Ils avaient accumulé en Belgique, — arrière naguère encore réputé de tout repos, — un matériel énorme. Si les progrès des Alliés continuaient tels que ceux du premier jour, comment aurait-on le loisir de sauver parcs et magasins, — en ce moment où la crise du matériel paralysait déjà en partie la défense allemande, — si précieux à garder ? Est-il dès lors surprenant que l’ennemi ait opposé, le 15, une résistance désespérée ; elle le fut en particulier au centre où cette résistance arrêtait pour quelques heures notre avance. Mais à gauche comme à droite, cette résistance était brisée. Le groupe du Nord occupait Booscheede, Marckhove, Vyfhuyshoek ; le groupement Nudant s’emparait de Gits, Gitsberg, Turckegem et atteignait la voie ferrée Thourout-Roulers ; le groupement Massenet saisissait Beveren, arrêté seulement devant le ruisseau,