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Page:Revue pédagogique, second semestre, 1906.djvu/234

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REVUE PÉDAGOGIQUE

pendant « au moins quinze Jours », ceux qui n’avaient jamais enseigné restaient à Paris, regardant les anciens faire la classe ou s’essayant devant eux à la faire eux-mêmes. Ce programme rappelle sensiblement celui des séminaires pédagogiques de J.-B. de La Salle. Il n’avait rien de transcendant.

Ce que les frères Tabourin avaient à enseigner n’était, d’ailleurs, pas compliqué : presque uniquement à lire et à écrire. À lire surtout : c’est à quoi Tabourin, propagateur des bons livres de piété pour le peuple, tenait le plus. À lire, même, un peu de latin, d’abord sans doute pour pouvoir répondre la messe, puis parce qu’il y a beaucoup de citations de la Bible et des saints Pères dans les livres jansénistes les plus élémentaires. Très peu de calcul : « l’arithmétique n’est pas d’une grande utilité pour le salut ». Pas question d’histoire, ni de géographie, ni de sciences, — dont au reste, dans les collèges même, on se souciait fort peu ; — mais pas de trace même de ces connaissances pratiques de géométrie, de dessin ou de comptabilité élémentaire que les Frères des Écoles chrétiennes commencèrent d’assez bonne heure à glisser dans leurs programmes. Au fond, pour Tabourin, comme pour La Salle, la préoccupation unique est la religion. Et cette préoccupation se nuançait chez Tabourin de ses préférences de secte : il voulait sauver, dit le Nécrologe, sauver ces enfants que « les ennemis de la saine doctrine », — entendez les ennemis du Jansénisme, — laissent croupir dans l’ignorance. C’est pour cela, c’est pour répandre les vues et les sentiments spéciaux de Port-Royal, et non pas, comme le dit M. Gazier, pour « conserver à l’enseignement religieux un caractère laïque », que les frères Tabourin tenaient à faire apprendre eux-mêmes aux enfants le Catéchisme. Ils se servaient du reste, à Paris même, du Catéchisme de Montpellier, approuvé par l’évêque Nicolas Colbert, un des plus fougueux « appelants ».

Pas plus que leur programme d’instruction, la méthode pédagogique des frères Tabourin n’était remarquable.

On serait tenté de voir une particularité janséniste dans la confiance qu’ils ont dans le Silence. « Pour l’obtenir, dit M. Gazier (p.21) d’après les Règlements, le maître devait demeurer lui-même aussi muet que possible. La plupart des commandements se faisaient par signes… Pour faire répéter les prières, le maître joignait