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M. CARRÉ

en vue que les petits paysans de la Haute-Saône et des Ardennes ; puis il s’adressa aux écoliers de France qui parlent des patois ou un français informe, puis à ceux qui ne parlent ni n’entendent le français, aux Flamands, aux Catalans, aux Bretons ; enfin aux indigènes de nos colonies. Le but ? faire connaître mieux le vocabulaire et la langue à ceux qui les connaissent imparfaitement, les enseigner à ceux qui les ignorent. La méthode ? celle qu’emploient inconsciemment toutes les mères, la méthode maternelle ou directe qu’il a formulée d’une façon définitive dans un livret à l’usage des maîtres. Là encore il fut un précurseur.

Tous les écoliers de France ont eu entre les mains son Vocabulaire français, ou Étude progressive et méthodique des mots de la langue usuelle considérés :quant à leur orthographe ;quant à leur sens ;quant à la manière dont ils s’unissent pour former des phrases, série de livrets bientôt suivis d’un gros volume de six cents pages, Les mots français dérivés du latin et du grec, à l’usage des écoles primaires supérieures et normales et de l’enseignement moderne. Il est permis de n’être pas tout à fait d’accord avec lui sur quelques points de détail, on ne peut méconnaître la valeur de l’ensemble.

C’est dans le département du Nord que M. Carré acheva sa carrière d’inspecteur d’Académie. Quoiqu’il n’y ait passé que deux ans, ceux qui l’y ont suivi retrouvaient encore longtemps après les empreintes profondes de son passage. Il obtint d’abord le dédoublement d’un service beaucoup trop chargé et conserva pour lui les Primaires avec le titre de Directeur départemental de l’enseignement primaire du Nord. Par son initiative furent organisés à Lille des cours préparatoires aux examens de l’Inspection primaire, du Professorat des écoles normales, et mème du Brevet supérieur pour les instituteurs et les institutrices déjà en fonctions. Il y professait lui-même la pédagogie. Ses successeurs n’ont eu d’autre peine que de continuer son œuvre.

En 1882, un décret du Président de la République l’appela à l’inspection générale. Là encore il fut un maître. Ceux qui ont eu l’honneur d’être inspectés par lui apprenaient, à le regarder faire, comment il faut inspecter. J’ai visité avec lui dans le Pas-de-Calais des écoles de tout ordre ; je croyais bien savoir mon métier ; mais quelque bienveillance qu’il m’ait témoignée