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REVUE PÉDAGOGIQUE

ment à la maison où vous avez été formés et de respectueuse reconnaissance pour les maîtres qui vous ont guidés. Il est fait encore de simplicité ; car, si vous avez une haute idée de vos fonctions, vous pensez modestement de vos personnes, sachant bien que, pour avoir une culture supérieure à certains égards, vous ne détenez que quelques parcelles de la vérité et de la science et qu’il vous reste beaucoup à apprendre. Il est fait, enfin, de tolérance, non pas seulement les uns envers les autres, mais envers tous ceux qui ne pensent pas comme vous, et de respect pour tout ce qui est respectable. Inutile d’ajouter, n’est-ce pas, qu’il est fait de dévouement professionnel, ce qui est encore la meilleure façon de prouver son patriotisme, et qu’il y entre surtout beaucoup de bonté pour ceux que vous avez mission de former ou de diriger, ayant appris par expérience que, pour atteindre les intelligences, il faut d’abord gagner les cœurs. » Voilà l’idéal qu’il léguait, avec son exemple, à ses disciples et à ses très dignes successeurs.

J’ai gardé le souvenir d’une grande fête et d’un grand deuil à Saint-Cloud ; la fête lui fut offerte en 1895, lorsqu’il eut été nommé officier de la Légion d’honneur ; le deuil fut celui de la séparation, en 1900. Il y eut en ces deux journées, à côté des témoignages de la plus ingénieuse reconnaissance, des paroles jaillies du cœur et des émotions silencieuses, également éloquentes. Pour M. Jacoulet, le dévouement à l’Université ne pouvait avoir d’autres limites que celles de ses forces. Lorsqu’il crut, à notre grand étonnement à tous, que celles-ci ne suffiraient plus à la tâche, il pria le Ministre de le relever de son poste, puis il en avertit ses anciens élèves : « Pour me résigner à un tel parti, leur écrivait-il, il a fallu que j’eusse des motifs bien impérieux et que vous devinez sans peine : l’âge, la fatigue, le besoin qu’éprouve tout homme de se recueillir au déclin de la vie ». On ne voulut pas laisser se rompre à la fois tout lien entre son œuvre et lui. Il fut nommé vice-président du Comité consultatif de l’enseignement primaire et « chargé d’une mission à l’effet d’étudier les questions relatives à l’organisation des écoles normales primaires et des écoles primaires supérieures ». Il put ainsi, pendant quelque temps encore, suivre et soutenir, dans leurs fortunes diverses, les dix-huit générations qu’il avait