Aller au contenu

Page:Sand - Adriani.djvu/79

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

quiète de mes mœurs. J’entendis madame de Monteluz, qui avait retenu presque toute ma ballade, et qui en cherchait la fin avec ses doigts sur le piano. Placé sous sa fenêtre, le long du rocher, je la répétai plusieurs fois. On fit silence longtemps ; mais tout à coup je vis un spectre auprès de moi : c’était elle. Elle me tendait les deux mains en me disant :

— Merci, merci ! vous êtes bon, vous êtes vraiment bon !

Elle avait la voix émue ; mais l’obscurité m’empêcha de voir si elle avait beaucoup pleuré et si elle pleurait encore. Je ne distinguais d’elle que sa taille élégante sous ses voiles blancs et le pâle ovale de sa tête, penchée vers moi avec une bonhomie languissante.

— Je ne veux pas que vous vous fatiguiez davantage, me dit-elle d’un ton presque amical. Venez vous reposer en jouant un peu du piano.

J’entendis alors la Muiron, dont l’ombre moins svelte se dessina derrière la sienne, lui dire à demi-voix :

— Chez vous ? à cette heure-ci ? comme si elle eût été avide de constater un fait acquis à sa politique.

— Eh bien, pourquoi pas ? répondit madame de Monteluz.

— C’est à cause de ce que l’on pourrait dire, reprit Toinette, qui parla encore plus bas et dont je devinai plutôt que je n’entendis l’observation.