Page:Sand - Cesarine Dietrich.djvu/242

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courte entrevue, après quoi il prit à part M. de Valbonne et lui exposa la situation de son esprit.

— Je crois sentir que je vivrai, lui dit-il ; mais ma guérison sera longue, et je ne veux pas être un objet d’effroi et de dégoût pour ma femme. Je voudrais ne la revoir que quand j’aurai recouvré tout à fait la santé. Pour cela il faudrait obtenir qu’elle passât l’été à la campagne.

— Êtes-vous encore jaloux ?

— Non, c’est fini. Césarine est trop fière pour songer à un homme marié, et cet homme est trop honnête pour me trahir. Je suis certain qu’elle m’aimerait si je n’étais pas un fantôme dont la vue l’épouvante quelque soin qu’elle prenne pour me le cacher. Elle voudra ne pas quitter Paris, si j’y reste ; elle serait blâmée. Il faut donc que je m’en aille, moi, que je disparaisse pour un an au moins ; il faut qu’on me fasse voyager. Dites à mon médecin que je le veux. Il vous objectera que je suis encore trop faible. Répondez-lui que je suis résolu à risquer le tout pour le tout.

Le médecin jugea que l’idée de son client était bonne ; la vue de sa femme le jetait dans une agitation fatale, et l’absence, le changement d’air et d’idées fixes pouvaient seuls le sauver ; mais le déplacement semblait impossible. Si on l’opérait tout de suite, il ne répondait de rien.

M. de Valbonne était énergique et regardait l’irrésolution comme la cause unique de tous les insuccès de la vie. Il insista ; le départ fut résolu. On l’annonça bientôt à Césarine, qui offrit d’accompagner son mari,