Page:Sand - Constance Verrier.djvu/116

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sion réelle, terrible, et, si quelque chose m’a appris à me préserver de ces passions-là, c’est justement le spectacle de celle-ci.

— Mais, dites-nous donc, sans plaisanterie cette fois, votre véritable philosophie ? dit mademoiselle Verrier. Si vous voulez philosopher, il ne faut pas railler.

— Eh bien, mais, reprit la duchesse, il y avait du vrai au fond de mon hyberbole. J’ai fait l’éloge de la prudence qui est la chose absolument nécessaire, à moins que l’on ne chérisse le scandale, et moi je le déteste ; mais je n’ai pas fait, pour cela, l’éloge de la débauche. Je n’ai pas vanté la régence, bien que vous m’en ayez gratuitement accusée. J’ai parlé des liaisons sûres, des affections douces, fidèles autant que possible. Si, au nom de la haute morale, vous venez m’excommunier, je me tais. J’ai le malheur de n’être pas dévote, et, quant à la loi civile, comme elle n’atteint que les faits accomplis et patents, comme aucun procureur et aucun magistrat n’a le droit de venir me demander ce qui se passe dans mon cœur ou dans ma tête, je ne vois pas où serait mon hypocrisie. Le silence que la morale publique vous oblige à garder n’a rien de perfide, et je trouve même qu’il y a quelque chose d’indécent à s’afficher. Si madame l’abbesse Héloïse revenait au monde, on la trouverait impertinente ou ridicule.

— Non pas à mes yeux, dit Constance. Je m’imagine que les grandes et belles passions ont fort bien fait de remplir le monde et de traverser l’histoire. On