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Page:Sand - Constance Verrier.djvu/31

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— Ma chère enfant, dit-elle à Constance en descendant l’escalier avec elle, j’ai une fantaisie : c’est de voir votre maison, votre intérieur, vos travaux. Je sais que vous ne recevez que de vieux amis de votre père avec leurs familles patriarcales. Je les effaroucherais, j’en suis sûre. Je connais le monde et toutes les sortes de monde. Il suffit d’un peu trop de falbala que j’étalerai sur un fauteuil, par mégarde, pour rendre soucieuse quelque douairière de la vieille roche ou pour faire baisser les yeux à quelque pudibond magistrat de soixante-dix ans. Je serais gênée moi-même, je ne serais pas moi, et mon désir de plaire à vos amis serait critiqué comme une vaine coquetterie. Recevez-moi, un soir, seule avec votre tante : qu’en dites-vous ? est-ce possible ? Ceci ne vous compromettra pas vis-à-vis des vôtres, car je ne compte pas prendre possession de votre vie cénobitique et y rien déranger par la suite. Je pars ! Dieu sait où et quand nous nous reverrons. Mais j’ai pour vous une sympathie véritable. Je suis comme la Mozzelli à cet égard-là, moi ! Je vous contemple comme une exception aux misères et aux chagrins de ce monde. Je voudrais emporter de vous un souvenir complet. Soyez sûre que les femmes ont les unes sur les autres une influence bien plus grande qu’on ne croit, souvent horrible, quelquefois excellente. Vous ne pouvez en avoir qu’une bonne. Ne la refusez pas à qui vous la demande sérieusement et de bonne foi.

Constance ne songea pas à résister à un désir si gra-