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Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 1.djvu/345

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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND
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tions d’enfance, à de vieilles haines sociales, je ne puis séparer l’idée de république de celle de régénération ; le salut du monde me semble reposer sur nous pour détruire, sur vous pour rebâtir. Tandis que les bras énergiques du républicain feront la ville, les prédications sacrées du saint-simonien feront la cité. Je l’espère ainsi. Je crois que mes vieux frères doivent frapper de grands coups, et que vous, revêtus d’un sacerdoce d’innocence et de paix, vous ne pouvez tremper dans le sang des combats vos robes lévitiques. Vous êtes les prêtres, nous sommes les soldats : à chacun son rôle, à chacun sa grandeur et ses faiblesses. Le prêtre s’épouvante parfois de l’impatience belliqueuse du soldat, et le soldat, à son tour, raille la longanimité sublime du prêtre. Soyons tranquilles pour l’avenir. Nous tomberons tous à genoux devant le même Dieu, et nous unirons nos mains dans un saint transport d’enthousiasme, le jour où la vérité luira pour tous ; la vérité est une.

Ces temps sont loin ; nous avons, je le pense, des siècles de corruption à traverser, et, tandis qu’il arrivera souvent encore à votre phalange sacrée de chanter dans des solitudes sans écho, il nous arrivera peut-être bien, à nous autres, de traverser en vain la mer rouge et de lutter contre les éléments, le lendemain du jour où nous croirons les avoir soumis. C’est le destin de l’humanité d’expier son ignorance et sa faiblesse par des revers et par des épreuves. Votre mission est de la ranimer par des conseils, et de lui