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le dieu inconnu

affronter la persécution ; peut-être, poussé par un élan surnaturel, crut-il que Dieu exauçait tout à coup sa prière et lui envoyait le bourreau qu’il avait demandé. Pamphile était seul ; à chaque instant de sa vie, il était préparé à paraître devant Dieu ; il demanda d’une voix calme :

— Que voulez-vous ?

Et il ouvrit la porte en même temps.

Alors, il vit une femme voilée, qui s’avança d’un pas timide, en disant :

— Ne me faites pas souffrir de supplice, ne me faites pas mourir ; je suis païenne et ne viens point ici pour vous trahir, mais pour invoquer votre Dieu.

— Notre Dieu a dit : « Rendez le bien pour le mal, » répondit Pamphile ; nous ne tuons pas, nous ne faisons pas souffrir de supplices, même à ceux qui voudraient nous trahir. Entrez, ma fille, et priez le vrai Dieu.

— Referme donc cette porte, répondit la femme païenne, car, si l’on me surprenait ici, je serais accusée de christianisme, et l’on me mettrait à la torture pour me faire avouer vos mystères.

Le prêtre referma la porte, et, lorsqu’il se retourna vers la femme, elle avait ôté son voile, et il vit qu’elle était jeune encore, richement vêtue, et d’une merveilleuse beauté, quoique son visage portât l’empreinte de la fatigue et de la tristesse.

— Qui es-tu ? lui dit le prêtre, et que demandes-tu ? Voici l’autel de notre Dieu : si tu veux le prier, je m’agenouillerai avec toi et je le prierai de t’exaucer.

Mais la femme, au lieu de répondre, regardait autour d’elle avec un mélange d’effroi et de curiosité, et, lorsqu’à la lueur de la lampe qui brûlait devant