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Page:Sand - Monsieur Sylvestre.djvu/328

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Elle n’a pas paru entendre, et, se relevant avec énergie, elle a jeté son chapeau, son mantelet, ses gants, et s’est mise à l’œuvre comme une sœur de charité. Elle n’a pas voulu quitter le chevet du lit jusqu’à mon arrivée ; elle était debout depuis trente-six heures quand je l’ai trouvée là. M. Nuñez et M. Duport ont été en course jour et nuit pour procurer tout ce qu’il fallait et ensuite pour aller m’attendre à Paris et m’amener ici. Hier seulement, j’ai obtenu que mademoiselle Vallier se reposât un peu, en lui remontrant que j’aurais peut-être besoin longtemps de son assistance et qu’il ne fallait pas m’en priver en tombant malade. Elle est allée dormir quelques heures à l’auberge des Grez, où sa négresse, avertie par elle, l’attendait. Mademoiselle Vallier ne veut pas remettre les pieds à la Tilleraie. Malgré le repentir exalté et sincère de Gédéon, elle ne lui pardonne pas. Elle ne lui a pas dit une parole de reproche, mais je vois qu’elle a horreur de lui ; elle lui répond par monosyllabes quand il essaye de lui parler, et, quand il a voulu lui persuader de retourner chez lui, elle l’a foudroyé à plusieurs reprises par un non si calme, si froid et si ferme, qu’il n’ose même plus la regarder.

Ce pauvre Pierre, quand il est tombé sur le terrain, s’est écrié : « À moi, Philippe ! » comme s’il eût senti que je le sauverais. M. ***, le grand chirurgien, a été amené de Paris : il n’a pas voulu se prononcer et s’est borné à approuver le traitement suivi. Hier soir enfin, la respiration s’est rétablie, les yeux se sont abaissés, le pouls a fonctionné régulièrement. J’ai pu sonder complètement la plaie sans craindre de voir le malade expirer entre mes mains ; aucun organe essentiel n’est lésé. L’inflammation tend à se dissiper ; il y a eu som-