Page:Sand - Souvenirs de 1848.djvu/424

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de lucidité, l’âme se sentira complète. Alors, la vraie poésie chantera son hymne de triomphe. Les mots esprit et matière feront place à un mot nouveau exprimant une vérité sentie et non plus cherchée, et ce qu’un révélateur aura éprouvé passera à l’état de vérité, en dépit de toutes les discussions métaphysiques et de toutes les analyses anatomiques.

Nous n’en sommes pas là. Jamais la scission entre le rôle de l’esprit et celui de la matière n’a semblé plus prononcée en philosophie et en littérature. Donc, l’homme est encore trop jeune pour se comprendre et se connaître lui-même. Tant mieux ! c’est un grand avenir ouvert pour les poètes et les artistes.

Les chants que voici sont des cris d’appel jetés sur la route. Ils sont remarquablement harmonieux et saisissants. Ils ont l’accent ému des impressions fortes, et le chantre qui les dit est un artiste éminent, on le voit et on le sait du reste. Souhaitons-lui longue haleine et bon courage ; nous avons lu ses vers en épreuves : nous ne savions pas encore son nom ; notre admiration n’est donc pas un acte de complaisance.

Paris, 10 mars 1866.

POST-SCRIPTUM[1].

Je n’ai rien à changer dans l’appréciation que je faisais, il y a huit ans, des premières poésies d’Ar-

  1. Écrit pour l’édition des Poésies réunies, publiée en mai 1875.