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Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/147

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rappela une circonstance insignifiante de ma première installation chez la Charliette. Ce jour-là, je lui avais demandé la clef de la cour pour aller à un rendez-vous et rentrer sans bruit. Elle m’avait dit en me la donnant :

» — Vous la remettrez, en rentrant, à un gros clou qui est au-dessus de l’établi de mon mari, afin qu’il ne s’aperçoive de rien. C’est un dévot qui se scandaliserait.

» Je cherchai aussitôt le clou où, deux ans auparavant, j’avais replacé cette clef. Elle y était en effet ; je la saisis en me recommandant au ciel pour que ce fût la même.

» C’était la bonne, c’était la même ! Elle tourna sans bruit dans la serrure, et moi, me voyant maître du champ de bataille en dépit de mes geôliers, je ne pus m’empêcher de dire en riant :

» — Tout va bien ! Mon hôte le serrurier tient en bon état tout ce qui est de son ressort.

» — Vous faites des calembours, dit mademoiselle de Nives stupéfaite, dans un pareil moment ? Vous êtes d’un beau sang-froid !

» — Non, je suis gai, fou de joie, répondis-je en refermant la porte avec précaution, mais il faut savoir ce qu’on fait.

» — Vous ne le savez pas ! vous oubliez la Charliette, qui doit m’accompagner !

» — Elle nous attend à la gare. Courons !

» — Je l’entraîne à travers les rues sombres