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L’Invention des ballins et Saint Galonnek rappellent des souvenirs historiques. Les Trois Rencontres, Teuz ar pouliet, l’Heureux Mao, la Groac’h de l’île du Lok, la Souris de terre et le Corbeau gris, les Korils de Plaudren, les Pierres de Plouhinec, transportent les curieux en pleine féerie bretonne, tandis que Peronnik l’idiot fera songer à la Table Ronde et aux paladins. Partout émerge, dans ses sentiments vrais et dans ses passions dominantes, le tempérament moral des Bas-Bretons. Mieux que le chant qui cristallise la pensée d’une race ou d’un siècle, la tradition en rend l’accent intime et flottant.

Tels sont l’œuvre et les procédés du maître coloriste qui a le plus fougueusement rendu l’idée bretonne, comme Brizeux est le musicien qui en a le plus harmonieusement combiné les éléments symphoniques. Rien de surprenant dès lors à ce que le lumineux novateur ait fait école, sauf, pour ses élèves ou pour ses héritiers, à se laisser entraîner par la griserie de sa manière ou à en perfectionner le dessin.

Ernest du Laurens de la Barre marche à la tête de l’école fantaisiste. Il dérive directement : de Souvestre, à qui il emprunte le titre de deux volumes, la mise en scène, les expressions imagées, l’arrangement ; et de M. de la Villemarqué, dont le nom figure à la dédicace des Veillées de l’Armor. Ce premier livre de du Laurens parut en 1857 : il est divisé en récits sérieux recueillis sur les lèvres des disréveller du Léonais, de la Cornouaille et de Tréguier, et en récits railleurs narrés par des marvailler du pays de Vannes ; une troisième partie contient des chroniques et des nouvelles. Le tout est un pastiche assez faible, maigre et très remanié. On peut retenir cependant le Hucheur de nuit et le Testament du recteur, ainsi qu’une bonne version du Diable boiteux, où Moustache, des Derniers Bretons, et l’Auberge blanche, du Foyer breton, sont agréablement fondus.

Six ans plus tard, Sous le chaume dénote un progrès. Du Laurens, abandonnant la distinction par conteurs, classe ses histoires en bretonnes pur sang, et en plus ou moins amplifiées par la transmission. Il a le double souci de ne