Page:Souvestre, Laurens de la Barre, Luzel - Contes et légendes de Basse-Bretagne.djvu/33

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Giraud a raison, de même qu’il a tort ailleurs quand il refuse aux nourrices la faculté de transmettre toute une mythologie à vingt siècles de distance. Aujourd’hui la science traditionnelle progresse de jour en jour, et les documents amassés permettent d’établir par la comparaison le degré d’originalité des merveilleux particuliers.

Les éléments fondamentaux de ces merveilleux sont partout les mêmes. Partout des ogres, des géants, des magiciens, des bons et des mauvais génies, des rois, des reines, des princes, des princesses, des fées, des nains ; partout des faibles qui réussissent ; partout des animaux sympathiques, très peu de malfaisants. Quand l’identité des personnages n’est pas absolue, il y a équivalence entre eux. Les califes de l’Orient et les rois de l’Occident, les petits hommes de la terre en Allemagne et les korr bas-bretons, les fées françaises et les péri persanes, les cadets de ma mère l’Oye et les innocents de Cornouaille, appartiennent évidemment à la même famille. Les tendances à la fortune et au pouvoir sont les mêmes, les talismans se ressemblent, et les détails des récits offrent souvent une pareille affinité. Sauf Riquet à la houppe, qui est trop précieux, et le Petit Chaperon rouge, qui se termine trop mal, tous les contes réunis par Perrault sont dans les mémoires de Basse-Bretagne. La trace de la Belle au bois dormant apparaît à la fin de la Princesse enchantée ; Cendrillon habillée en jouvenceau, le Petit Poucet, la Barbe bleue, Peau d’âne, traversent fréquemment nos récits ou s’y incorporent à titre d’épisodes ; les variantes bretonnes des Fées sont nombreuses ; Geneviève de Brabant se croise avec le Petit Poucet dans la Bonne Femme et la Méchante Femme ; les outres où sont cachés les quarante voleurs d’Ali-Baba ont pour pendants les douze mannequins du Pape Innocent ; les métamorphoses de la princesse et du génie dans l’Histoire du deuxième Calender enjolivent le Magicien et son valet. L’Histoire de Beder, prince de Perse, et de Giauhare, princesse du royaume de Samandal, a dans sa seconde action le germe de la Groac’h de l’île du Lok. Cette dernière tradition, avec des vestiges de Peronnik l’Idiot, est plus évidemment encore,